Fulgence Ndagijimana
Avant
de commencer ce petit article, j'aimerais partager avec vous
une surprise
que j'ai eue il y a quelques années qui en fait n'est
pas étrangère à l'histoire que je vais vous
raconter. Un jour que nous suivions un cours sur Luc/Actes au
chapitre des récits d'enfance, une religieuse demanda
pieusement au professeur de l'Ecriture qui était de renom
: « Pensez-vous que Luc a mis ces choses dans la bouche
de Marie et des autres ou il a eu une révélation
spéciale ?». Le gentil Père regarda
la soeur un moment et lui dit : « C'est une construction théologique
car Luc n'a ni enregistré la discussion avec Marie et
l'ange Gabriel ni d'ailleurs pour le magnificat ».
La soeur a presque arrêté le cours !!
Quand
les fondations s'effondrent, quand ce que nous avons toujours
tenu pour vrai
et sacro-saint prouve sa vulnérabilité. Quand la
conception virginale de Jésus ne résiste plus l'épreuve
ni de la raison ni de l'histoire, il faut trouver la valeur essentielle
du Christianisme libéré des vieux vêtements
dont il a été affublé au cours des siècles.
Une restauration s'impose et elle est même urgente !!
Le
choc que la bonne religieuse a eu à faire face, je l'avais subi
pendant mes cours de Philosophie surtout avec la Philosophie
des Lumières. C'est ce genre de crise que j'ai essayé et
essaie encore de résoudre aujourd'hui tant au niveau personnel
que communautaire.
Le Burundi est un pays à 90% chrétiens
orthodoxes comme d'ailleurs son voisin du nord le Rwanda. (Au
passage, le nombre de chrétiens n'a pas empêché les
deux pays de sombrer dans des tueries fratricides. Mais ceci
n'est pas ma préoccupation pour le moment). Depuis un
certain temps et très probablement à cause du rôle
réel ou supposé que les Eglises ont joué dans
les crises que nous traversons, nombre d'intellectuels ont développé une
certaine méfiance envers elles. Le
manqué de dialogue sur des questions essentielles, la
manie d'imposer ce qu'elles perçoivent comme la vérité,
le manqué de chance d'exprimer ses doutes sont autant
de facteurs qui poussent certaines personnes à se retrouver
dans des communautés restreintes où le doute
chercheur (ou méthodique pour reprendre
l'expression de Descartes), la solidarité, la croissance
spirituelle, l'amour de Dieu et du Prochain trouvent une oreille
attentive et un Coeur
aimant.
"L'Assemblée
des Chrétiens Unitariens du Burundi" est
un groupe qui, partant du postulat que "Chrétiens" et "Unitariens" ne
sont pas des concepts opposés, se propose de croire en
un seul Dieu (quelle que soit l'expérience et l'image
que les membres en ont) et d'être ouvert au message de
Jésus qui pour nous est un modèle à imiter
et non un Dieu à adorer. Protestants libéraux et
anciens catholiques se retrouvent pour des célébrations
deux fois par mois ou c'est plus l'amour, la vie et la fraternité qui
sont célébrées.
Notre
groupe s'est engage à vivre un christianisme libérateur
par lequel le message de Jésus nous guide, nous conduit
vers Dieu et nous connecte avec nos frères et soeurs.
Nous pensons que nous n'avons pas besoin de la doctrine de la
Trinité échafaudée à Nicée
(325) et à Constantinople (381) et qui n'a visiblement
pas de base scripturale. Nos ressources sont la Bible, la sagesse
humaine exprimée dans des textes philosophiques et d'autres
textes dignes de méditation.
Le
groupe fondé il y a bientôt trois ans s'efforce
de construire une communauté au sein de laquelle les
différences sont plutôt une richesse et la recherche
spirituelle n'a de limites que la finitude humaine qui nous
maintient dans notre place et permet à Dieu de garder
sa grandeur. Puissent
les chercheurs de Dieu grandir dans leur vie spirituelle et atteindre
un développent intégral.
Fulgence Ndagijimana,
le 9 février 2004
Fulgence
Ndagijimana est le Président de l'Assemblée
des Chrétiens Unitariens du Burundi, le troisième
groupe en Afrique après
l'Eglise Unitarienne d'Afrique du Sud établie au Cap
Town et la Fraternité Unitarienne du Nigeria.
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