André
Gounelle 1. Une
vie présente
2. Présent et
à venir
3. Après la mort
4. La résurrection
des corps
5. Affirmation et prudence
Le Nouveau Testament parle très souvent (environ
40 fois) de ”vie éternelle". Ainsi, l’évangéliste
Jean (ch. 3 v.16) affirme que Dieu a envoyé son fils pour
que "ceux qui croient en lui ne périssent pas, mais
qu'ils aient la vie éternelle", et Paul écrit
aux Romains (ch. 6, v.23) que la vie éternelle est le don
que Dieu nous fait en Jésus Christ.
Que faut-il entendre par cette
expression "la
vie éternelle" ?
1. Une vie
présente
Quand on parle de "vie éternelle",
il ne faut pas penser tout de suite à une vie dans l'au-delà,
qui commencerait après notre décès, qui concernerait
ceux qui sont morts à la vie terrestre.
"Vie éternelle"
désigne une existence transformée parce que Dieu y
est présent, parce que le Christ l'habite et l'oriente, parce
que l'Esprit l'anime. Elle commence dès à présent,
dans notre vie actuelle et dans notre monde. "Celui qui croit,
a la vie éternelle" dit Jésus (Jean, Ch. 6 v.
47). Il n'emploie pas un futur. Il ne dit pas que le croyant aura
la vie éternelle, mais bel et bien qu’il l'a. Quand
on vit en fonction de Dieu, pour le Christ, au service du prochain,
on est dans la vie éternelle. Notre existence n'est plus
seulement charnelle (c'est-à-dire dominée par nos
intérêts et le souci de nous-mêmes), elle devient
spirituelle (c'est-à-dire transformée et renouvelée
par l'action de l'Esprit).
2. Présent
et à venir
Cette présence et cette
actualité de la vie éternelle sont essentielles. Le
reste vient après et est secondaire. Les êtres humains
se sont toujours beaucoup préoccupés de ce qui suit
leur décès (il suffit de voir dans une librairie le
nombre de livres qui en traitent pour constater que cette question
reste très présente dans notre monde). Cette préoccupation,
tout à fait légitime, ne doit pas détourner
notre attention de ce que nous vivons et avons à faire aujourd'hui.
Calvin a écrit que le chrétien ne se conduit pas comme
des "gendarmes" (soldats) qui "ont déjà
fait leur temps" et qui ne pensent qu'à leur retraite.
Le croyant se concentre d'abord, en priorité, sur ce que
Dieu lui donne de vivre aujourd'hui et sur les tâches qu'il
doit accomplir. Toutefois, pour le Nouveau Testament, la vie éternelle
ne se limite pas à notre existence physique dans ce monde.
Elle a une dimension future. Elle se continue au-delà de
notre décès. Si la préoccupation de l'avenir
ne doit pas nous faire oublier l'importance du présent, à
l'inverse, l’attention à donner au présent n'écarte
pas ni n'élimine la question de l'avenir.
3. Après
la mort
Partout, dans toutes les civilisations
et à
toutes les époques, on a voulu se représenter l'au-delà.
On a imaginé des itinéraires, tantôt effrayants,
tantôt rassurants, qui conduisent de la vie terrestre à
l'existence de l'au-delà à travers diverses étapes
(séparation de l'âme et du corps, jugement, purgatoire,
traversée d'un tunnel, apparition d'un être de lumière,
etc....)
Il faut bien reconnaître que ces descriptions
ne reposent pas sur grand chose. On ne peut ni en vérifier
l'exactitude, ni les réfuter. Il nous faut admettre et accepter
notre ignorance. De l'au-delà, nous ne savons rien. Si nous
en connaissions quelque chose, ce ne serait précisément
pas l'au-delà.
Le Nouveau Testament ne donne
aucune description de la vie après la mort. Il se contente
de l'affirmer et de l'évoquer à travers des images
et des paraboles qui ne nous dévoilent pas ce qu'elle est,
mais qui nous en donnent, selon une expression de Calvin, "un
goût" (un goût et non un savoir).
4. La résurrection
des corps
Le symbole dit des Apôtres entend résumer
le message du Nouveau Testament sur ce point (et tout particulièrement
le chapitre 15 de la première épître aux Corinthiens)
par la formule suivante "je crois en la résurrection
des corps".
Pour ma part, je ne prends pas
cette formule à la lettre. J'y vois une image qui donne
quelques indications.
Que nous dit-elle ?
a. On
parle de "résurrection", pour souligner que la vie éternelle,
comme d'ailleurs la vie physique, nous est donnée par Dieu
Nous ne la possédons pas. Nous la recevons et ne devons jamais
oublier de qui nous la tenons. Le christianisme a évité
de parler de l'immortalité de l'âme", expression
qui laisse entendre que la vie éternelle appartiendrait naturellement
à notre être, ou à une partie de notre être.
Par nous-mêmes nous ne sommes que mort ou néant. Notre
être n'est pas en nous. Dieu nous le confère. Il a
suscité la vie lors de la création; il la ressuscite
à tout moment dans le monde et au delà de ce monde.
b. Par
corps, il ne faut pas entendre notre cadavre qui est destiné à
la décomposition. La mention du corps ici signifie deux
choses:
- d'abord, que la finitude humaine
persiste dans la vie éternelle. Nous y restons des êtres limités,
comme nous le sommes dans la vie présente par notre corps.
Il ne faut pas concevoir l'entrée dans l'au-delà comme
une sorte de divinisation qui nous rendrait infinis et nous ferait
participer à l'essence divine. Nous sommes des créatures
et nous le demeurerons.
- ensuite, que notre identité et notre personnalité
ne disparaissent pas. En effet, notre corps fait de nous des êtres
distincts, reconnaissables, séparés des autres par
une frontière nette, et formant une unité.
Paul parle de "corps
spirituel" (1 Cor. ch. 15, v. 44) expression que ne reprend
malheureusement pas le symbole dit des Apôtres. Elle indique
qu'une transformation profonde s'opère. La vie éternelle
ne consiste pas seulement dans le prolongement ou la continuation
de la vie actuelle. Elle est une autre forme d'existence.
5. Affirmation
et prudence
Il faut sans doute se
garder d'en dire plus. Peut-être
même suis-je allé trop loin ! L'affirmation que la
vie après la mort, comme notre existence actuelle, nous vient
de Dieu devrait nous suffire. Nous ne somme pas, et nous ne serons
jamais en état de la décrire, de dire en quoi elle
consiste et comment les choses s'y passent. Et finalement, cela
n'a pas grande importance car la foi ne communique pas un savoir,
elle invite à la confiance.
Ne spéculons donc pas trop sur l'au-delà,
et ne nous détournons pas de ce qui est au cœur de l’Évangile:
la vie nouvelle que le Christ fait surgir en nous dès maintenant,
dès ici-bas, vie dont nous croyons qu'elle ne se terminera
pas à notre décès.
André Gounelle
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