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 Spiritualités
L'hérétique

Jean-Claude Barbier

Vagabond de l’âme,
de ses convictions vivant comme de l’air du temps
Verseau avant l’ère, libre comme le vent,
sans regard derrière, il allait vers les horizons,
Chemin faisant, pèlerin d’une quête.
Il avait ainsi quitté son Eglise
Sans gêne aucune, sans nulle rancune.

Notre Maître Jésus, disait-il, avait été défiguré une première fois
sous les crachats d’une foule ameutée, toute excitée par des meneurs,
sous la flagellation romaine réservée aux rebelles,
par l’agonie d’une crucifixion sur la colline du Golgotha

Mais il avait été défiguré une seconde fois,
cette fois-ci par ses dévots, les prédicateurs qui rapportaient ses propos en ayant bien soin de jouer les intermédiaires, les zélés de tout opportunisme, les notables du consensus, les lettrés qui se disent savants, les chercheurs de sens à tout prix. Ils en firent un héros, un demi-dieu entre ciel et terre, un Tout-puissant faiseur de miracles, un Christ cosmique régulant une Histoire sainte entre alpha et oméga.

Lui, il aimait ce rabbi galiléen tout simplement
pour ce qu’il avait dit, pour ce qu’il avait fait, pour sa personne,
pour avoir montré le ciel de l’espérance aux hommes de bonne volonté
pour avoir consolé les pauvres et les affligés en leur promettant la richesse d’un Royaume.

Lui, l’hérétique, il louait Dieu pour la Vie reçue, pour cette Création où il se sentait si fortement convié.
Il aimait Jésus simplement, peut-être parce qu’il fut vagabond en son temps comme lui l’était aujourd’hui.

Il était parti pour trouver des frères et des sœurs de même conviction,
dans l’amitié, dans la ferveur du cœur, dans la foi partagée.
À l’heure Internet, il allait de site en site, tel un apôtre des temps modernes,
toujours en service des autres, désirant faire Eglise autrement.

Pourtant, homme de mesure, ne cherchant point à aboyer avec les loups,
ni fonder une nouvelle tribu ecclésiale, ni suivre un gourou,
il fut calomnié par les sectaires qui disaient avoir trouvé la Vérité universelle,
par les partisans qui se mettent à rouler croyant avoir trouvé l’homme providentiel.
Il fut excommunié par des orthodoxes de tout bord,
trahi sans vergogne par les siens, comme Jésus l’avait été en son temps.

Pourtant, il ne perdait pas courage, persévérant dans son chemin,
Sachant que les textes semés à tout vent germeront en futures moissons.
C’était, disait-il, l’œuvre des générations futures.
Il s’était fait de nombreux amis, même si ceux-ci étaient parfois lointains et silencieux,
habitant d’autres villes, sous d’autres cieux.

Ne mettez pas votre lumière sous le boisseau, disait-il,
apportez vos talents à l’avènement du christianisme restitué,
dans la fierté d’une tradition renouvelée,
éminemment moderne et d’avenir,
Agissez au sein de la cité démocratique et fraternelle,
assurément laïque, désormais inter convictionnelle
pour un mieux vivre ensemble.

Jean-Claude Barbier, Bordeaux, le 6 avril 2007  



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