Lorsqu'on se tourne vers la vie et la mort de Jésus,
on ne voit pas un monde qui serait abandonné de Dieu. En
Jésus de Nazareth, celui que nous pensons être absent,
nous fait signe, nous convie à regarder au-delà
des apparences pour discerner une présence de Dieu insoupçonnée
au premier abord. Aujourd'hui, la présence de Dieu nous
l'entrevoyons, là où des hommes et des femmes vivent
selon l'amour du Christ, là où des hommes se dévouent
pour les autres.
Jésus paya de sa vie sa fidélité
au Royaume, ouvert aux pauvres, aux exclus. «Vous l'avez
fait mourir, mais Dieu l'a ressuscité». Il ne faut
pas penser la résurrection comme un processus miraculeux
de réanimation d'un cadavre. Il s'est agi d'un acte créateur
de vie nouvelle: Dieu a fait du crucifié le premier citoyen
d'un monde nouveau; davantage, le centre intégrateur d'une
humanité nouvelle. Sans remettre nécessairement
en question la foi au Christ ressuscité, j'avoue avoir
été fortement interpellé par une lettre du
Maghreb, parue dans la revue Études Théologiques
et Religieuses (1), dans laquelle
on pouvait notamment lire les lignes suivantes : “Une foi
qui se fonde d'abord sur la résurrection, avant de s'être
attachée d'une manière toujours plus vivace et profonde
à cet homme-là, qui a agi et qui a parlé,
est menacée de déséquilibre; elle est guettée
par le mythique. Car la mort de Jésus n'est pas la conséquence
d'un oracle divin; elle représente l'aboutissement d'un
processus mille fois vérifié, la fin d'un homme
qui a engagé toute sa vie dans la lutte pour un idéal.”
Je pense qu'il est dommageable et probablement aberrant
que notre attachement à Jésus ait besoin de la résurrection.
Si Jésus ne peut être suivi que parce qu'il est ressuscité,
il y a quelque chose de malade dans notre foi.
Willy Abrassart
(1) ETR 1983/1
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