J.F. Haan Les religions monothéistes se réclament
toutes d'Abraham, considéré comme le père de
tous les croyants. Ainsi chrétiens de toutes dénominations,
musulmans et juifs sont les enfants d'un même père.
Malheureux et pauvre patriarche, quel spectacle
te donnent tes nombreux enfants! Ils se battent avec un bel acharnement
sur les cinq continents. Les uns veulent imposer leur loi morale,
les autres la loi coranique, tandis que d'autres nous proposent
la Thora. Et dire que l'on trouve «Aime ton prochain comme
toi-même», en arabe, dans le Coran, en hébreu
dans la Thora, en grec dans le Nouveau Testament, et dans toutes
les langues du monde dans la bouche de Jésus de Nazareth
(les sociétés bibliques chrétiennes ayant traduit
la Bible en tout ou en partie dans près de deux mille langues
et idiomes).
Certes, il y a des gens qui essaient de vivre en
harmonie avec les autres. Ils sont même les plus nombreux.
Mais voilà toutes les religions souffrent de maladies incurables
hélas ! L’intolérance et l'intégrisme
! Maladies qui provoquent rejet, incompréhension, haine et
répulsion de tout ce qui est autre. Laissons aujourd'hui
de côté l'Irlande et ses problèmes, ses ultras
catholiques et ses ultras protestants. Nous avons déjà
pelé des oignons avec le révérend Paisley et
les fanatiques de l’IRA. L'actualité de ces derniers
jours nous impose de regarder vers cette terre du Moyen-Orient qui,
si le bon sens ne triomphe pas bientôt, servira d'immense
champ de bataille et finira bien par s'étendre jusque chez
nous.
Je voudrais exprimer notre désarroi et notre
incompréhension devant une violence quotidienne, d'une haine
qui appelle à toujours plus de haine au nom d'Allah, au nom de Iahvé.
De chaque côté on compte et on pleure les victimes
innocentes. Comme européen, vivant dans un État de
droit, je vous dirai bien franchement que la religion musulmane
me fait peur. En effet, elle est cléricale et théocratique.
Là où elle est dominée par les intégristes,
elle impose la charia ce que les juifs appellent de leur côté
la loi du Talion, «Oeil pour oeil, dent pour dent !»
Les effets sont les mêmes. Les juifs à couettes ne
veulent-ils pas imposer le respect sans restriction en Israël
de la loi de Moïse alors qu'ils ne sont qu'une petite minorité
?
Deux choses également me plongent dans une
grande incompréhension et me rendent perplexe. D'une part,
alors que je compte de nombreux amis juifs pour aucun arabe, je
me pose la question, n'avons-nous pas été, nous les
occidentaux, trop tolérants, trop faibles à l'égard
d’Israël et des sionistes en particulier, parce que nous
ne parvenons pas à nous disculper de la Shoah, parce que
nous sommes toujours sous l'effet de ce massacre d'innocents, de
ce génocide d'il y a cinquante ans, pour lequel si (pour
reprendre une expression à la mode) nous ne sommes pas coupables,
nous sommes quand même responsables. Mais, pour se faire pardonner,
est-il normal de laisser se créer de nouvelles injustices
en laissant les Israéliens construire toujours de nouvelles
implantations dans des territoires destinés aux Palestiniens?
Je me demande également pourquoi, ces mêmes
Israéliens, ayant eu ce désir d'avoir leur propre
nation, ne peuvent comprendre que cette même volonté
tout aussi légitime puisse exister chez leurs voisins palestiniens
?
Nous ne sommes plus au temps de l'Ancien Testament
que je sache, où l'on se battait pour des points d'eau, nécessaires
à des peuples nomades et a leurs troupeaux !
Terre Sainte, qu'ils l’appellent, tous les
monothéistes, ce coin du monde fertilisé par le sang
des guerres ancestrales, des croisades, des colonisations, des conflits
d'influence ! Terre Sainte parce que Salomon fit construire le grand
temple, parce que sur ces ruines fut construite la mosquée
El-Aksa, parce que Jésus de Nazareth vint y annoncer son
évangile !
L'ennui réside dans le fait que la Bible
(l'Ancien et le Nouveau Testament) et le Coran sont présentés
comme des livres révélés par Dieu, Iahvé ou Allah.
Chacun pouvant y trouver le pire comme le meilleur ! Et c'est vrai,
déjà au 16e siècle, Sébastien Castellion
l'affirmait au grand dam de Jean Calvin, il n'y a pas de lecture
objective de la Bible, à fortiori du Coran.
Loin de nous de nous moquer de la prière.
Que ce soit celle du juif tout de noir habillé, surmonté
d'un grand chapeau noir d'où se détachent de larges
couettes (qui feraient envie à Frieda la Blonde) devant le
mur des lamentations, les deux mains serrant la Thora et oscillant
de tout son corps. Que ce soit celle du musulman déchaussé,
faisant ses génuflexions dans la mosquée érigée
à quelques mètres du même mur présentant
ses deux mains vers La Mecque pour invoquer Allah ! Cependant, ne pourrions-nous pas leur suggérer
une démarche commune?
Que l'un et l'autre demandent au Père d'Abraham
dont ils se réclament un esprit de sagesse, alors leurs mains
libérées de leurs rites culturels propres pourront
s'entremêler les unes dans les autres dans une volonté
de fraternité réelle. Alors ces mains n’appuieront
plus sur des gâchettes, elles ne lanceront plus des pierres,
elles serviront uniquement à un travail de réconciliation
à la grande joie de leur Père commun, Abraham !
J.F. Haan, mars 1997
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