Ce titre a quelque chose de provoquant. Il
semble mettre en cause la foi d’une majorité de chrétiens. Majorité?
A vérifier. En effet, les quelques sondages et enquêtes
auprès des protestants français et suisses montrent qu’ils se distancient
sensiblement des doctrines ecclésiastiques.
Dieu
Il n’est pas étonnant de découvrir que plus
de la moitié des interrogés (58%) refusent de
donner
à Dieu un qualificatif. 23% par contre disent ne pas croire
en Dieu tel qu’il est présenté par les églises.
±15% lui attribue les qualificatifs de: amour, bon, grand
architecte, juste et juge.
Jésus
13% des protestants croient à la Trinité, c’est-à-dire
considèrent Jésus comme le Sauveur et le place sur
le même pied que Dieu. 67% estiment qu’il est soit un
prophète (le plus grand), soit un homme choisi par Dieu pour
apporter la bonne nouvelle qui est message de libération
pour l’humanité. Le reste ne se prononce pas.
La Bible
Les personnes interrogées accordent une valeur certaine à
la Bible. Plus de 50% d’entre elles estiment qu’elle
est un livre où s’exprime la parole de Dieu, tandis
que les autres la considère comme une référence
morale ou une œuvre importante de notre culture. 40% disent
ne jamais la lire.
La mort
Interrogés sur la mort, les protestants ont répondu
de façon plus dispersée: si ±8% seulement considèrent
qu’il n’y a rien après la mort, la foi en la
résurrection a relativement peu d’adhérents:
±18%. Ils sont suivis de peu par ceux qui croient en la réincarnation
(±11%). L’idée d’une vie après
la mort est toujours présente pour plus de 50% des interrogés
qui ont choisi la réponse «la mort est une chose naturelle,
mais je ne sais pas ce qu’il y a après».
Le baptême
Sur la question du baptême, ±26% déclarent désirer
baptiser leurs enfants et ±14% choisissent la présentation
et laisseront leurs enfants décider à leur majorité,
afin de valoriser ce rite du baptême qui leur paraît
encore important.
La Cène
Plus de 80% des participants aux cultes (voir à “culte”)
vivent la cène comme un symbole de fraternité et d’adhésion
à une foi universelle. Moins de 10% des participants la ressentent
comme “sacrement”.
Le culte
La question sur la participation au culte montre que la moitié
des protestants n’y vont qu’à l’occasion
de cérémonies familiales telles que baptêmes,
présentations, mariages ou enterrements. Parmi les autres,
± 30% d’entre eux y participent très occasionnellement
et de manière cyclique. 5% seulement y participent avec assiduité.
L'église
Plus d’un tiers se considèrent protestant sans église.
Et ± 60% se distancient nettement d’une communauté
locale. Seulement 10% se sentent membres d’une église.
Par contre 50% feront référence à un pasteur.
Le pasteur
20% des interrogés disent qu’il ne le connaissent pas.
18% le disent accueillant. Pour 25% il est conservateur, 13% le
trouve moderne, 17% considèrent qu’il n’est pas
assez autoritaire, 3% qu’il n’est pas assez fervent,
10% qu’il est trop politisé. Mais une grande majorité
est solidaire au ministère pastoral (72%).
Le sentiment d'appartenance
Quant à la signification de l’appartenance au protestantisme,
elle concerne moins l’importance de l’église
ou de sa doctrine (18%), ou l’habitude (16%) que des valeurs
du protestantisme et de l’éducation (65%).
Les valeurs
La liberté de conscience, la rectitude, la droiture, la responsabilité
individuelle, la philanthropie et l’humanisme sont des valeurs
considérées comme inhérentes au protestantisme.
Il n’est pas étonnant de retrouver 80% des interrogés
engagés ou sympathisants de mouvements où les notions
de démocratie, tolérance, solidarité sont mises
en évidence. Le salut et la fidélité à
une doctrine (calviniste, luthérienne, barthienne, etc.)
ne concerne qu’un peu moins de 8% d’entre eux.
L'éducation
80% des interrogés pensent qu’il est utile que les
enfants reçoivent une éducation religieuse protestante.
Ils sont nombreux à attribuer la responsabilité de
cette éducation autant à la famille qu’à
l’église. Ils sont encore plus nombreux (90%) à
considérer comme utile les cours d’histoire du protestantisme
dans la scolarité.
En conclusion
Il paraît clairement à l’analyse
de ces enquêtes et sondages que, sans oublier leurs références
protestantes, les interrogés ont pris des distances par rapport
aux organisations ecclésiastiques. Des points de doctrines
tels la divinité de Jésus, la résurrection,
le salut par le sang du Christ ne sont plus suivis que par une petite
partie d’entre eux. Les doctrines sont donc moins suivies,
faisant souvent place à des conceptions spirituelles et éthiques
personnelles.
A l’inverse, ils insistent sur la nécessité
de transmettre plus que jamais les valeurs du protestantisme, notamment
au travers l’éducation des jeunes. La religion semble
ainsi être une dimension importante de l’éducation,
même si la réalité est plus sombre, au vue de
l’ignorance des jeunes concernant des notions élémentaires
de la culture protestante.
L’Eglise a tenté de définir la
vérité dans un certains nombre de points doctrinaux,
et elle a perdu ou masqué quelque chose d’essentiel:
le caractère vivant, personnel et donc existentiel de la
foi en Dieu. L’Eglise à chercher à justifier
ses pratiques et ses rites par une tradition vieille de quatre siècles,
et à légitimer des doctrines par une dogmatique basée
uniquement sur la Bible. Le croyant se trouve constamment devant
des problèmes dont la Bible ne parle pas, auxquels elle ne
donne ou ne permet aucune réponse: la manipulation génétique,
l’avortement, la cohabitation, le chômage, l’homosexualité,
l’euthanasie, etc. On ne peut répéter purement
et simplement des versets bibliques, ni trouver dans la Bible la
recette ou la formule qui permet de faire face à toutes les
situations.
1991
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