CORRESPONDANCE UNITARIENNE    mai 2003

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n° 19

Lectures

Lu dans Approches unitariennes (bulletin de l'Association unitarienne francophone - AUF), n° 53, printemps 2003

  - Une présentation d'Alexandra David-Neel, par Jean-Louis Buchert, pp. 4-9.
Née à Saint-Mandé le 24 octobre 1868 et décédée à Digne le 8 septembre 1969, Louise Eugénie Alexandrine Marie DAVID, dite Alexandra, épouse NEEL, fut anarchiste, bourgeoise, franc-maçonne, bouddhiste, théosophe, protestante libérale, et, sur le plan professionnelle, orientaliste, exploratrice, cantatrice, journaliste, écrivain … et bien d'autres choses encore. Elle fut aussi unitarienne (elle écrit "unitaire" comme on disait au 19ème siècle). Voir ses oeuvres publiées de son vivant ("La lampe de sagesse" aux éditions du Rocher, etc.), mais aussi ses notes intimes, carnets personnels, correspondances, en partie éditées à titre posthume par Jean Chalon (1985 - Librairie académique Perrin). Selon J.-L. Buchert "La doctrine exposée ressemble à s'y méprendre à ce qu'on trouve dans les ouvrages des transcendantalistes unitariens d'Amérique". Son carnet personnel commence par cette phrase : "Sous la protection de Dieu, en communion d'esprit avec mon maître Jésus, Epictète et les philosophes stoïciens".

  - Un compte-rendu du prix Goncourt "Les ombres errantes" de Pascal Quignard, par Daniel Glasser, p. 17.
D. Glasser cite la pensée de l'auteur sur les communautés d'hommes libres, non inféodées aux impérialismes idéologiques. "Les sociétés secrètes d'hommes libres sont portées à devenir de plus en plus minuscules. Elles sont presque individuelles. Mes amis me sont de plus en plus chers et de moins en moins nombreux". Selon lui, la pensée de l'auteur est très proche de l'unitarisme.

  - Un article de Jean-Marc van Hille, intitulé "Pauvres unitariens !", p. 2
où l'auteur se demande pourquoi les opinions croyantes, pour la plupart, n'ont pas encore entériné le fait que "Dieu a changé de visage". Nous ne pouvons plus nous représenter Dieu comme autrefois. "Dans une lettre envoyée d'Afrique du Sud à Théodore Monod dans les années 50, Theilard de Chardin écrivait : "En vérité, et sous une forme parfaitement orthodoxe, je crois qu'on peut dire que, pour nos yeux - et c'est là peut-être le plus grand événement moderne - Dieu change de dimensions et de teinte". p.2-3.

Lu sur le site Profils de libertés (prolib.net) :

  - La jésuslâtrie, par Pierre A. Bailleux
"Quand on aura dit : Jésus est Dieu, que saura-t-on en réalité sur Jésus ? … C'est pourquoi, si vous me demandez «Qui est Jésus ?» je répondrai : je l'ignore et je m'incline devant le mystère de sa personne. Si vous me demandez «Qui est Jésus POUR VOUS ?» je répondrai : Ah ! je commence à le savoir. Pour moi, il est mon Maître !"

  - L'Evangile selon Marthe, par M.P. Troquet-Heine
Jésus, fondateur de la théologie de la libération, a été crucifié par l'Optus Dei (ou l'Inquisistoriastique). Lazare et ses deux sœurs ont ouvert un restaurant pour les pauvres, gratuit. Or l'Optus Dei reproche à Lazare et à Marie de ne pas avoir placé Marthe, leur sœur cadette, au couvent du Chômage perpétuel. Marie demande à Paul d'écrire une lettre en grec pour que le règlement idiot de cette noble institution ne soit pas appliquée. "Recevoir Jésus, c'est l'affaire de tous. Lazare comprit aussitôt que dans un repas fraternel, il n'y avait de bonnes parts que lorsqu'elles étaient égales. Aussitôt, mon frère s'est levé. Une vraie résurrection ! Lui qui somnolait régulièrement dans son fauteuil attendant d'être servi ; lui qui, parfois sentait mauvais, car il ne changeait son linge de corps que lorsque je lui préparais des chemises propres dans la selle de bain ! Tout le monde s'y est mis. Jésus continua à nous parler dans la cuisine. Lazare lui dit que, grâce à lui, il revivait, qu'il était prêt à aider ses deux sœurs. Ensemble, nous avons fait de notre maison, en souvenir de lui, cette auberge que tu connais où l'on reçoit les passants nécessiteux".

  - Et si l'on parlait vrai ?, par Jacques Herman
De l'art de tourner autour du pot pour parler de la mort et de l'après mort, et de nous consoler par des bondieuseries.

  - La fin du religieux par Jacques Chopineau
"Dieu est au ciel et toi, tu es sur la terre" (Qohelet, 5,1). Nous sommes responsables de cette terre. La théologie dogmatique est un grenier on ne peu plus poussiéreux. "Un christianisme institutionnel-dogmatique-confessionnel" est en train de mourir, mais cela ne signifie pas la fin du religieux chrétien. Les paroles de Jésus continueront de nourrir la vie et les actes d'une bonne partie du genre humain, parfois malgré l'enseignement des magistères".

Lu dans la Revue de théologie et de philosophie - Rthph (Lausanne), n° 134, 2002

c.r. par Jean-Claude Barbier du livre de Paul ABELA, Je crois, mais parfois autrement, Paris : L'Harmattan, 2002, 160 p. ("Chrétiens autrement")

A 81 ans, l'auteur nous livre ici son testament spirituel au terme d'une vie d'ingénieur et de militant associatif. Pour une fois, ce n'est ni un clerc d'Eglise, ni un théologien, ni un philosophe, mais un simple laïc (étant toutefois passé entre les mains des Jésuites au niveau de l'enseignement secondaire mais, dit-il, trop libre d'esprit pour y rester). Libre penseur, hors d'atteinte de sa hiérarchie qui n'a aucune prise sur les laïcs, l'auteur peut s'exprimer. Il en profite modérément, d'un ton calme et serein qui est le sien. Il avance toutefois des propositions qui peuvent fortement irriter nos conservateurs. A la suite du théologien suisse Maurice Zundel, l'un de ses maîtres spirituels, Dieu ne serait pas moins mère que père et la Trinité est à repenser dans le sens d'une Quaternité : Père, Mère, Fils, Esprit ; tétraèdre à l'appui (p. 101). Que les protestants se rassurent car ce schéma nous dispenserait d'une piété mariale de substitution, la quaternité suffisant au besoin d'une féminité sacralisée (p. 97 et 111). Que le lecteur se rassure aussi car P. Abela ne se perd pas dans des méandres métaphysiques. Il avoue tout simplement son modalisme : Dieu, unique, se manifeste à nous de façon différente (p. 95), ainsi que son adoptionnisme - une divinisation ascendante de Jésus et non plus descendante, qui n'est donc plus une incarnation (p. 107). Cet accueil de Jésus par Dieu, qui en fait son Fils, est un processus ouvert à tous, puisque, en parlant de la Cène, l'auteur insiste sur le partage (et non pas sur le sacrifice rédempteur d'un péché originel qui a perdu son historicité) (p. 59) et nous annonce que, nous aussi, à l'exemple de Jésus, nous sommes tous "enfants de Dieu" ou fils adoptifs, appelés, nous aussi, "à incarner Dieu ou le représenter dans ce monde". L'auteur cite les Béatitudes : "Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu" (Mt. 5,7). Ce sont en définitive tous les hommes de bonne volonté qui se retrouvent en Dieu et qui sont autant de manifestations de Dieu en ce monde.

J'ai particulièrement apprécié la clarté de l'auteur lorsqu'il situe l'homme comme coresponsable de la Création, acteur à part entière de l'histoire de l'humanité, inspiré par Dieu mais non déterminé. Foin des bondieuseries (l'auteur se garde de parler comme cela !) où le dévot voit des signes partout qui le guident, pour que Dieu se montre à lui à chaque événement et l'accompagne dans la lumière. Loin d'un dieu tout-puissant, nous cheminons dans notre humanité et nos prières de demande (y compris nos prières dites "universelles") sont à côté de la plaque. Jésus nous l'a déjà dit : Dieu connaît mieux que nous nos besoins et il est plein de compassion. Nul besoin de crier vers lui, même si c'est pour emprunter la beauté du langage du psalmiste. L'auteur, qui a beaucoup œuvré dans des groupes de réflexion liturgique, n'accepte plus que des prières de confiance ou de louange. C'est là toute une tradition d'assistance, soit directe, soit par Eglise ou saints interposés, qui s'écroule. A ce compte, les Eglises risquent de perdre beaucoup de "quémandeurs" qui s'adressent à Dieu en désespoir de cause pour les misères de leur vie. Avec P. Abela, catholique ouvert à l'œcuménisme, nous sommes en compagnie d'«un courant réformiste sérieux, dans la lignée de Pierre Dentin, Louis Evely, Henri Guillemin, Jean Kamp, Hans Küng, Marcel Légaut, John A.T. Robinson, John S. Spong, Jean Vimort, Maurice Zundel, etc.» (p. 4).