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 Les chroniques



    Pierre Bailleux

 

 

 

   

 


Le langage de l’hypocrisie

 

 

« Toute forme de mépris, si elle intervient en politique, prépare ou instaure le fascisme.» Camus

Ce lundi 16 mai 2005, le quotidien israélien Maariv révèle que le gouvernement israélien a décidé d’appliquer une décision prise par M. Shimon Peres et son gouvernement travailliste en 2003 à savoir la construction d’une nouvelle barrière dans le secteur de Jérusalem.

Selon Maariv, « ce projet s'inscrit dans le cadre d'un plan gouvernemental plus vaste arrêté en 2003 qui prévoit l'inclusion de Maalé Adoumim et du Goush Etzion (bloc d'une quinzaine de colonies comptant environ 12.000 habitants, près de Bethléem) à l'intérieur de la barrière de séparation qu'Israël construit en Cisjordanie » (AFP).

Ces travaux visant à créer “un fait accompli” seront lancés avant l'éventuel retrait de la bande de Gaza - à partir du mois d'août - et avant la relance de négociations avec les Palestiniens…

Pour rappel :
- Le ministre israélien de la Défense Shaoul Mofaz avait approuvé le 20 mars dernier la construction de plus de 3.500 logements supplémentaires à Maalé Adoumim.
- Le Premier ministre israélien Ariel Sharon avait ensuite déclaré le 24 mars au secrétaire d'Etat adjoint pour le Proche-Orient, David Welch, et au conseiller adjoint à la sécurité nationale, Elliott Abrams, que le feu vert donné par le ministère de la Défense à ce plan était “définitif”.

Présentée par Israël comme une clôture antiterroriste, la barrière de séparation est qualifiée de mur de l'apartheid par les Palestiniens car elle mord profondément sur la Cisjordanie occupée et rend problématique la création d'un Etat palestinien. La Cour internationale de Justice (CIJ) a réclamé le 9 juillet 2004 son démantèlement et l'Assemblée générale de l'ONU a voté le 20 juillet 2004 à une majorité écrasante une résolution exigeant qu'Israël respecte cet avis.

À la même époque, il y a bientôt un an, Jean Ziegler, rapporteur spécial de l’ONU, sur le droit à l’alimentation, s’est trouvé sur le banc des accusés pour avoir documenté les violations par Israël du droit à l’alimentation et des droits humains dans les territoires occupés. On l’accuse d’avoir agi avec des critères « non objectifs ». Ces accusations d’antisémitisme ont été portées contre le rapporteur de l’ONU parce qu’il « a porté contre Israël des accusations qui n’auraient pas de rapport avec les termes du mandat qui lui a été confié ».

Nous n’avons pas accepté que les Allemands disent « nous ne savions pas »… à propos des exactions nazies. Que penseront nos enfants européens quand nous leur dirons que « nous ne savions pas »… ?

Nous ignorions les « attentats ciblés » (1) ? la détention illégale de prisonniers politiques ? les destructions de maisons ? l’arrachage massif des oliviers ? les confiscations de terres ? les humiliations quotidiennes aux check-points ? la construction de milliers de logements dans les colonies ?

« Nous ne savions pas » ?

À moins que nous ne soyons amnésiques ! et que je sois antisémite ?

Pierre Bailleux, le 16 mai 2005   

(1) Yuval Diskin, artisan de la pratique des assassinats ciblés de militants palestiniens, a pris (dimanche 14 mai 2005) la tête du Shin Bet, les services de sécurité israéliens. Yuval Diskin, 49 ans, a développé la pratique de la traque et de l'assassinat des Palestiniens recherchés, notamment des auteurs ou instigateurs présumés des attentats et des attaques armées qui ont tué des centaines d'Israéliens. Les meurtres ciblés, souvent par le moyen de missiles, ont tué des extrémistes mais aussi des dizaines de passants.