CORRESPONDANCE UNITARIENNE

Réseau francophone animé par la
Fraternité unitarienne de Bordeaux

 

Novembre 2006  n°61
 

 

 

 

Sommaire

 

- Christianisme Janus

- Blibliographie

- Informations

 

   

 

 

 

   

 

Le christianisme Janus

Actualités
unitariennes

 

 

Dans une conférence prononcée devant des pasteurs protestants,
le prieur [du monastère catholique] de Bose [en Italie], Bruno Bianchi observait : " Dès lors que notre être chrétien vit la communion avec le Seigneur, il y a toujours une communion avec les frères et sœurs,
cet espace, c'est l'Église. Toutefois, il faut le dire, l'Église est rarement aimée aujourd'hui. Nombreux sont ceux qui se disent des chrétiens sans Église. ”
“  La radicalité de l’Evangile ”,
Entretiens avec Enzo Bianchi et la communauté (Parole et Silence, 2006)
cité dans le bulletin “ Quelques nouvelles ” de la mouvance des Amis de Marcel Légaut
(bulletin n° 194 du mois de novembre 2006)


Le christianisme Janus

par Jean-Claude Barbier

Disciples du rabbi Ièshoua bèn Yossef de Nazareth, les chrétiens s’engagent par le baptême à vivre les enseignements de leur maître et à suivre le chemin qu’il leur montre et qui mène à Dieu. Le christianisme se réfère à une personne, Jésus dit le Christ, et à un Dieu qui, historiquement, s’est révélé aux hommes, ce dont nous parle la Bible. Comme toute autre religion, elle est centrée sur un culte que les chrétiens libéraux pratiquant les célébrations libres appellent le partage de la parole, du pain et du vin. C’est une voie particulière parmi bien d’autres.

Mais le christianisme s’accompagne, en même temps, d’une formidable ouverture vers les autres – ni plus ni moins vers les “ païens ” - qui commença lorsque Pierre vit une grand nappe tombée du ciel et pleines de bonnes victuailles (Actes des apôtres chap. 10), après qu’il eut accepté l’invitation du centurion romain Cornelius. C’est ainsi, qu’à la fin de chaque célébration, les participants sont envoyés aux quatre coins du monde pour prononcer la Bonne nouvelle et s’occuper d’autrui en toute charité et compassion.

Mieux, la sotériologie qui voulait que le salut passa nécessairement par un Jésus intermédiaire, ou encore par les sacrements de l’Eglise, ou encore par ses directives, n’est plus de mise depuis que Faust Socin (1539-1604) a récusé l’explication rédemptrice de la Passion, n’y voyant que la seule condamnation à mort d’un juste par le Sanhédrin des Juifs et le pouvoir romain, et que l’Eglise universaliste, fondée aux Etats-Unis en 1779 à Gloucester dans le Massachusetts par le prédicateur wesleyen et immigré anglais John Murray (1741-1815), tourna résolument le dos à la prédestination augustinienne et calviniste en présentant un Dieu Amour tellement bon qu’il ne pouvait plus condamner personne !

La voie du salut désormais grande ouverte à tous, le christianisme cultuel s’est mué en un christianisme d’ouverture, acceptant de côtoyer toutes les autres grandes sagesses pour un chemin ensemble, invitant à Assise ou ailleurs tous les responsables religieux du monde entier pour prier pour la paix et convier tous les croyants au développement de ce monde. Continuant cette ouverture aux autres, l’humanisme chrétien s’adresse à tous les hommes de bonne volonté, non croyants y compris, proposant une morale dite naturelle comme base d’une éthique universelle, sans plus de condition de foi. Le prochain est alors le plus loin de nous : le plus pauvre, la victime d’une discrimination, l’étranger, voir l’ennemi, etc.

Donc, à la fois, regard vers l’intérieur du temple, au creux de la chambre la plus secrète de la maison, afin d’y prier Dieu en toute intimité, là où le chrétien prononce le Notre Père que lui a enseigné le rabbi Ièshoua (Mt 6, 1-18), et regard porté au loin et embrassant l’humanité toute entière, sans halte ni repos à l’exemple du Maître qui, prêcheur itinérant en Galilée, n’avait où poser sa tête ; et à sa suite l’apôtre missionnaire Paul de Tarse.

Le christianisme aurait-il donc deux faces comme l’un des plus anciens dieux, récupéré par la mythologie romaine, Janus (ou Dianus), dont la fonction principale était de garder les portes et qui, pour cela, était doté de deux visages, joints en recto verso.

Mais comment passer concrètement d’un regard vers l’intérieur à un regard vers l’extérieur ; du christianisme cultuel, à cette ouverture à l’universel ? Alors que les confessions n’ont eu de cesse de se séparer à coups de credo, le christianisme unitarien, conjointement avec d’autres mouvances libérales, notamment celles réunies en France par la Fédération des réseaux du Parvis, propose des célébrations libres où chacun peut exprimer sa foi, individuellement, en dehors de tout discours confessionnel particulier. Tous les chrétiens qui se reconnaissent mutuellement, qui acceptent une théologie plurielle, peuvent dorénavant faire Eglise, s’assembler pour prier et partager dans un contexte post-confessionnel.

Mais jusqu’à quel point pouvons nous ainsi ouvrir nos assemblées cultuelles ? S’il n’y avait que l’enseignement de la Parole par un ministre chargé de cela, l’assistance, comme pour une conférence intéressante, pourrait être totalement ouverte, y compris à des athées en recherche spirituelle, sauf toutefois à des contradicteurs qui viendraient pour polémiquer. En cela la tradition protestante pourrait être des plus ouvertes puisqu’elle insiste précisément sur l’enseignement en chaire. On pourrait penser aussi à des assemblées qui valoriseraient la seule méditation des textes bibliques, sinon des textes spirituels d’origine variée ainsi que le font les congrégations unitariennes-universalistes.

Seulement, voilà, pour les chrétiens, il n’y a pas seulement le partage de la parole, mais celui – aussi – du pain et du vin. Or, la pratique d’une communion (chrétienne ou autres) veut que les mêmes aliments circulent entre tous les présents sans exception puisqu’il s’agit précisément de créer du lien social, au nom d’un ancêtre ou d’un dieu, entre tous les présents. Dans le cas de la communion chrétienne, c’est donc une même coupe qui circule et la même miche de pain qui est rompue. Et si l’un des participants, pour une raison ou une autre, ne peut pas prendre d’alcool, la cérémonie doit alors passer du vin au jus de raisin ! Nous ne sommes donc plus dans le contexte d’une distribution individuelle faite par un ministre du culte et pouvant se moduler selon les personnes (par exemple la communion sous les deux espèces aux clercs et l’hostie seule aux laïcs). Liées à cette communion, les Eglises ne peuvent guère s’ouvrir au delà des seuls chrétiens, sinon en ne la faisant pas à certaines occasions (mariages, enterrements, rencontres inter-religieuses, etc.).

Le christianisme unitarien permet de faire un pas en plus puisque la communion se fait au nom de Iéshoua (et non pas au nom de Dieu). Iéshoua n’étant plus Dieu dans notre théologie, d’autres croyants (les musulmans et les baha’is notamment qui le vénèrent eux aussi) ou des non-croyants (agnostiques, voir des athées) qui s’intéressent à lui d’une façon ou d’une autre, peuvent alors participer à ce rite de communion en lui donnant le sens qu’ils lui accordent ; pour certains ce sera un simple signe de fraternité

Et si la personne ne s’intéresse pas particulièrement à Iéshoua ? La réponse n’est plus alors dans une ouverture encore plus grande du champ chrétien car les élastiques cassent lorsqu’elles sont trop tendues, mais dans une autre approche du religieux cette fois-ci d’emblée universelle, acceptant toutes les croyances religieuses, spirituelles et philosophiques, et non plus à partir d’une religion particulière comme c’est le cas du christianisme. Une telle approche nous est proposée entre autres par le théisme, la franc-maçonnerie ou encore l’universalisme-unitarisme. Le christianisme n’est pas nié dans sa contribution à l’universel et Iéshoua continue à faire partie des grands sages de l’humanité, mais il se trouve dépassé par une approche qui se veut plus large. Des chrétiens apprécient une telle démarche et sont partie prenante. C’est par exemple le cas de ceux qui, aux Etats-Unis, sont regroupés au sein de l’Unitarian Universalist Christian Fellowship (UUCF), ce qui prouve bien que, s’il y a bien différence d’approche, il n’y a pas forcément contradiction ni incompatibilité entre le christianisme unitarien et l’unitarisme-universalisme, même si l’on est passé d’un particulier ouvert jusqu’à l’universel à un accès direct à l’universel.

Encore faut-il que les règles du jeu soient clairs et nets pour tous et qu’on évite tout confusionnisme, car il ne faudrait pas que le dieu Janus devienne une girouette !

 

Bibliographie

Le buste de Théodore Monod

Vous pouvez voir le buste de Théodore Monod au Jardin des plantes à Paris et, en attendant, sur le site Wikipedia, François Papin le 26 septembre

Michel Servet : suites

1) à Genève

Pour compléter le dossier du mois précédent sur Michel Servet, le pasteur Roger Parmentier nous signale une pièce essentielle qui vient de paraître en août à Genève sous la plume de Frédéric Amsler, professeur d’histoire du christianisme à l’université de Lausanne (à qui l’on doit déjà le précieux Evangile inconnu. La Source des paroles de Jésus chez Labor et Fides en 2001) : “ L’Affaire Servet et la naissance de l’unanimisme protestant genevois ”, n° 4-5, pp. 1-40, août 2006, Bulletin du Centre protestant d’études, Centre protestant d'études (CPE), case postale 3158 - 1211 Genève 3, tél. 022 807 27 37, fax 022 807 27 38, courriel : cpe-geneve@swissonline.ch ; on peut payer par chèque au CCP français : Grenoble 2.398.57 X pour le CPE.
“  En bon connaisseur du protestantisme genevois, il y fait une excellente présentation des tensions politico-théologiques et ecclésiales à Genève à l’époque de Calvin. “ Frédéric Amsler, à travers les personnages clés de la condamnation, se risque à nous livrer la radiographie (le décryptage !) des responsabilités de chacun, y compris de Servet lui-même. Si la décision finale de l’Espagnol de revenir à Genève ressemblera toujours à un geste suicidaire, on suit avec attention les tergiversations complexes entre Calvin, le Magistrat, l’époque et la religion ” (Ph. Chanson dans la préface de cet article) ”.
Message du pasteur Roger Parmentier, 3 octobre.

2) à Barcelone

“  Je reviens de Barcelone où la Servetus International Society, animée par le professeur Juan Naya, a organisé ces 20-21 octobre, un congrès international intitulé “ Michel Servet, de tout notre cœur ” (Miguel Servet con todo el corazon). N’étant pas spécialiste de la vie et de l’œuvre de Michel Servet, j’ai choisi d’intervenir sur l’après Michel Servet, du côté de ses héritiers spirituels dont nous faisons partie, et faisant suite mon article “ Qui sont les héritiers spirituels de Michel Servet ? ”, paru dans l’“Hommage à Michel Servet ” de la revue Théolib (n° 24, décembre 2003, pp. 49-58), article mis en ligne sur le site de cette revue. Ce projet de communication fut agréé et je me suis finalement retrouvé avec d’autres qui parlaient de leur propre corpus religieux en le reliant, eux aussi, à Michel Servet (3ème session : Parallelisms with other historical characters and religious movements), entre autres Andrew M. T. Dibb qui vient d’écrire un livre sur l’Eglise fondée par Emmanuel Swedenborg, un Suédois mystique du XVIIIème siècle dont l’Eglise se développa aux Etats-Unis et en Afrique du Sud.

En ce qui me concerne, j’ai parlé de l’accès à l’universel chez les unitariens (les chrétiens unitariens et les unitariens-universalistes). J’ai fait ma communication en espagnol afin d’être compris par le maximum des participants. Jaume de Marcos, président de la Sociedad unitaria universalista de España (SUUE), présent à cette manifestation, m’a donné un coup de main pour la traduction de mon texte en cette langue. A noter une autre participation française en la personne de Valentine Zuber, professeur à l’Ecole pratique des hautes études à Paris (EPHE), dont les travaux historiques sur l’érection des monuments en hommage à Michel Servet au début du XXème siècle (à Genève, Annemasse, Vienne et Paris) sont connus. Les actes du congrès seront publiés en anglais et en espagnol. ”
c. r. de J-C Barbier fait au groupe de discussion “ Unitariens francophones ” le 27 octobre.

3) suite en français

Mme Rolande-Michelle Benin, agrégée de lettres classiques et docteur en patristique grecque, et Mme Marie-Louise Gicquel, agrégée de lettres classiques, se sont attelées à la tâche de traduire en français le “ De trinitatis erroribus ” ; Information donnée par Fabien Girard en complément de celle parue sur le site de l’Instituto de estudios sijenenses Miguel Servet. Le manuscrit a été déposé à la Librairie Champion depuis une dizaine de mois, mais sa publication n’est pas encore programmée. Mme R.-M. Benin continue à traduire toute l’œuvre de Michel Servet. Elle a reçu la distinction de conseillère de l’Instituto de estudios sijenenses Miguel Servet basé à Villanueva de Sijena.

Tribune libre unitarienne

La revue électronique montréalaise, mise en ligne sur le site du Mouvement universaliste unitarien au Québec (MUUQ), vient de sortir un numéro sur la Tolérance (vol. 2, n° 2, 2006), qui a été piloté par Maurice Cabana-Proulx . Cette revue a été fondée en 2005 par Léo Poncelet et Ray Drennan (pasteur de l'EUM de 1995 à 2005). A noter, dans ce numéro, l’article de Joshua Snyder, ministre du culte de la Second Unitarian Church of Omaha qui, lors d’un sermon prononcé le 9 décembre 2001 et intitulé “ Hanoucca, fête des lumières ”, émit son avis sur la dissidence chrétienne qui donna naissance à l’American Unitarian Conference (AUC) en 2001. Nous reviendrons sur ses propos car ils sont au cœur d’un débat intéressant qui nous concerne : comment concilier le congrégationalisme, où chaque communauté locale ou mouvement est en principe indépendant, avec des instances nationales unitaires ?

Signalons que le site du MUUQ a été rénové. Il indique bien son lien avec l’Eglise unitarienne de Montréal (ce qui n’était pas perceptible auparavant), avec une photo de l’église (“ sanctuaire ” en langue française du Québec) à l’appui. Le mouvement est maintenant personnalisé, avec une présidente, Mme Hannelore Poncelet, un webmestre, et un logo (un oiseau sur fond bleu qui s'échappe du calice à la flamme). Sa rubrique des "Nouvelles" est enfin régulièrement actualisée.

Une pluralité de formes de vies et de consciences dans l’univers est-elle possible ?

David Dubois, docteur en théologie systématique, après avoir soutenu, en juin 2000, une thèse à la Faculté libre de théologie protestante de Montpellier sur “ Consciences au pluriel et sens, pluralité de formes de vies et de consciences dans l’univers, sens et finalité : tentative d’approche théologique ”, a touché le grand public par son livre La Question extraterrestre et le christianisme  aux éditions Paradigmes (Orléans), livre que nous avons signalé dès sa parution dans notre bulletin n° 53, mars 2006. Il multiplie également articles de presse et conférences sur cette question. Il poursuit la promotion de son livre sur un de ses sites.

Quelles sont les conséquences philosophiques, théologiques, épistémologiques, d’une pluralité probable de formes de vies et de consciences extraterrestres dans notre univers ? Un nouveau dialogue science-foi loin des dogmatismes, inscrit dans une laïcité en dialogue, soucieux du respect de la vie et de la sauvegarde écologique de notre planète…
Pour en savoir plus , deux autres sites "perso"

Invitation à la théologie buissonnière

Après La Source intérieure et un Petit lexique des hérésies chrétiennes, Michel Théron poursuit son invitation à l’hétérodoxie en nous invitant cette fois-ci à la Théologie buissonnière avec 50 mots clé de culture religieuse. Vous avez jusqu’au 15 décembre pour bénéficier du prix de souscription de 22 euros port inclus en écrivant à l’éditeur : Golias, B.P. 3045, 69605 Villeurbanne cedex.

Informations

Congregazione Italiana Cristiana Unitaria (CICU)
“  Cari Amici, Abbiamo un nuovo sito ” http://www.unitariani.splinder.com/, Voici le cri de joie de notre ami Roberto Rosso quelques semaines après que son site précédent eut été détruit par des hackers. Nous souhaitons longue vie et paix à ce nouveau site. En complément, le groupe de discussion : http://it.groups.yahoo.com/group/unitariani/
Théologie et Libération
Le 2ème Forum mondial Théologie et libération aura lieu à Nairobi en janvier 2007 et aura pour thème  “ Une spiritualité pour un autre monde possible ”. Le Réseau européen Eglises et Libertés y participera, en partenariat avec l’IMWAC (le mouvement international dont la filiale française s’appelle Nous sommes aussi l’Eglise NSAE). Du fait de sa présente au sein de la Fédération des réseaux du Parvis, laquelle fait partie de ce réseau européen, l’Assemblée fraternelle des chrétiens unitariens (AFCU) se trouve concernée par cette manifestation.

Libres propos

Louanges
par David Renom (Fort-de-France), message du 6 octobre 2006 au groupe de discussion “ Unitariens francophones ”

Merci à vous, Marie, de ne pas avoir attendu le mariage pour concevoir, dans l'intimité de vos fiançailles avec Joseph, cet enfant dont la vie adulte nous a bouleversés, parti malheureusement trop tôt.
Merci à Toi, YAH, de nous laisser Te tutoyer avec cette familiarité sans égal, mais non sans le plus grand respect,
et de nous permettre de T'invoquer par ce diminutif chargé pour nous de plus de force et d'amour qu'aucun autre nom de dix mille syllabes.

l’Assemblée fraternelle des chrétiens unitariens (AFCU)
est membre de la Fédération des réseaux du Parvis


          

 

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