CORRESPONDANCE UNITARIENNE    janvier 2003

Pourquoi nous sommes unitariens

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N° 12

Nous sommes peu nombreux en Suisse à nous déclarer “ unitariens ”. Cependant la plupart des protestants libéraux sont unitariens de fait. Des catholiques le sont aussi sans le savoir.

Citons quelques unitariens célèbres : le savant Isaac Newton, le président américain Th. Jefferson, l’infirmière Florence Nightingale, le pasteur Charles Wagner, le docteur Schweitzer, le compositeur Bela Bartok, le professeur Théodore Monod. Nous voilà en bonne compagnie.

En quoi différons-nous des autres protestants ?

Notre Dieu n’est pas une Trinité (Père, Fils et Saint-Esprit). Il est UN, père de tous les humains. Nous l’adorons et le prions. Jésus ne fut pas l’incarnation de Dieu et nous ne le prions pas. Il fut un homme, le plus grand des prophètes d’Israël. Nous l’aimons et lui obéissons. Il est notre Maître. Le Saint-Esprit n’est pas une personne divine et nous ne le prions pas. C’est une force que Dieu donne à celui qui décide de lui obéir et de servir son prochain.

La mort de Jésus sur la croix ne fut pas un sacrifice expiatoire destiné à effacer nos fautes et à nous éviter l’enfer. En fait, Dieu pardonne gratuitement, sans effusion de sang, à celui qui se repent et change de conduite, dans l’amour de Dieu et du prochain.

Nous lisons les livres de la Bible avec un sens critique car ils diffèrent par la date, le contenu et leurs objectifs. Les paroles et les actes de Jésus en sont, à nos yeux, la partie la plus précieuse.

Écoutez Jésus

Marc 10, 40 : (aux fils de Zébédéé) Je ne puis vous promettre que, dans le Royaume, vous serez assis à côté de moi. Dieu seul peut le décider.

Matthieu 24, 36 : (quand viendra le Royaume ?) Le jour et l’heure de la venue du Fils de l’homme, personne ne les connaît, ni les anges du ciel, ni le Fils de l’homme. Dieu seul les connaît.

Marc 10, 18 : (réplique à un questionneur) Pourquoi m’appelle-tu “ bon ” ? Dieu seul est bon.

Jean 5, 30 : Je ne fais rien de mon propre chef, mais je fais la volonté de mon Père céleste.

Jean 17, 13 : La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, Toi, le Dieu unique et véritable, ainsi que ton envoyé, le Christ Jésus.

Jean 20,17 : (Jésus à Marie) Va dire à mes frères que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu.

Ainsi donc, Jésus ne s’est jamais déclaré égal à Dieu, et encore moins Dieu lui-même. Les apôtres Pierre et Paul confirment :

Actes. 10, 58 : (Pierre à Corneille) Ce Jésus, issu de Nazareth, Dieu lui a conféré l’Esprit et la puissance. Il a passé partout en bienfaiteur […] car Dieu était avec lui.

Actes. 17, 32 : (Paul aux Athéniens) Dieu jugera le monde par l’homme qu’Il a choisi pour cela. Rom 15, 32 : Notre Maître, par la chair un descendant de David, fut par l’Esprit un puissant fils de Dieu (homme de Dieu).

Éphésiens 1, 17 : Que le Dieu de notre Maître Jésus-Christ … vous donne un esprit de sagesse.

Comment naquit l’unitarisme ?

C’est en Europe, au 16e siècle, qu’est né l’unitarisme. Il est la branche la plus radicale de la Réformation. Tant les anglicans et les calvinistes que les catholiques persécutèrent cette confession rivale et ceux qui osèrent la prêcher ouvertement périrent sur les bûchers, brûlés vifs avec leurs écrits. On comprend pourquoi la plupart de ces réformés rejetant le dogme de la Trinité se résignaient au silence, ou ne se confiaient qu’à des amis sûrs.

Saluons pourtant deux Etats tolérants au 16e siècle : la Pologne, où une Eglise réformée anti-trinitaire devint légale en 1565, et la Transylvanie, où une Eglise semblable obtint en 1568 la protection du prince Jean-Sigismond. En Pologne, les anti-trinitaires reçurent dès 1579 l’appui du théologien italien Fausto Socino. Son enseignement, le socinianisme, se répandit également en Europe occidentale. Par contre, la re-catholicisation de la Pologne entraîna l’expulsion des anti-trinitaires en 1660. Certains trouvèrent refuge en Transylvanie, d’autres à l’ouest, en Hollande principalement. En Transylvanie, les réformés, rejetant le dogme trinitaire, firent des progrès sous la houlette de leur évêque, Ferencz David. En 1589, ils reçurent de leurs adversaires théologiques le nom d’unitariens, nom qu’ils adoptèrent et ont conservé jusqu’à nos jours. L’unitarisme gagna également la proche Hongrie. En dépit des persécutions subies sous la domination autrichienne, les unitariens de Transylvanie tinrent bon et comptent aujourd’hui 130 paroisses environ. La Hongrie voisine en a une dizaine.

Expansion en pays anglophones

Venant de Pologne via la Hollande, la réforme socinienne arriva en Angleterre et fut prêchée activement au milieu du 17e siècle. Ayant fait la connaissance d’unitariens de Transylvanie, les sociniens anglais adoptèrent pour eux-mêmes ce nom d’unitariens en 1672. Mais l’opposition du Parlement, allié de l’Eglise anglicane, les obligea à la clandestinité. Il leur fallut attendre l’an 1774 pour disposer à Londres d’une chapelle. Au 19e siècle, par contre, ils purent organiser de nombreuses congrégations dans tout le Royaume, de même que dans le Commonwealth britannique, du Canada à l’Inde, du Nigeria à l’Australie.

Aux Etats-Unis, la laïcité permit, au 18e siècle, le développement du libéralisme protestant. Ainsi naquit à Boston l’unitarisme américain, encouragé par les écrits unitariens provenant d’Angleterre. Le mouvement, parti de Boston, gagna tout le pays au 19e siècle. Des Eglises unitariennes virent également le jour aux Philippines et au Japon.

Retour en Europe

Au 18e siècle, des pasteurs réformés, en particulier à Genève, se mettent à moderniser le calvinisme au nom de la raison. Ils renoncent à parler de Trinité, de péché originel et d’autres doctrines traditionnelles, se concentrant sur la spiritualité et l’éthique enseignée par Jésus. Les recherches des biblistes renforcent ce mouvement et l’on voit se créer, vers 1830, à Strasbourg, le protestantisme libéral.

Des protestants libéraux rencontrent vers 1900 les unitariens anglo-saxons et constatent leurs points communs. Dès lors, on voit naître sur le vieux continent des associations unitariennes, en Tchéquie, en Allemagne, en Italie et ailleurs. En France, à Nancy, l’association Charles Wagner devient unitarienne en 1960 ; elle sera remplacée en janvier 1997 par la Fraternité unitarienne de Nancy. D’autre part, une Association unitarienne française voit le jour en 1986 Elle est devenue francophone pour accueillir Belges et Suisses romands.

PRIERE UNITARIENNE

Ô Dieu, source de toute guérison, remplis mon cœur de foi en ta bonté. Communique-moi une espérance calme, courage et confiance. Que ton Souffle saint m’anime, et que je marche sur le chemin d’amour que Tu me proposes par ton serviteur Jésus de Nazareth, notre Maître.

Roger Sauter, Le Lignon (Genève), président d’honneur de l’Association unitarienne francophone (AUF)