CORRESPONDANCE UNITARIENNE    octobre 2005

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unitariennes


n° 48

Bibliographie

Roger Parmentier : "L'Algérie m'a transformé"
témoignage publié dans REYNAUD Michel, 2004, Elles et eux, aux éditions Tirésias
(21, rue Letort, 75018 Paris, www.editions-tiresias.tk)

À Pâques 1935, Roger Parmentier découvre l'Algérie à l'occasion d'un voyage d'étudiants protestants de Paris. Il est avec le missionnaire et ethnologue Maurice Leenhardt en pays kabyle. Il décide ses parents à s'installer en ce pays et la famille s'installe à Constantine deux ans plus tard. Sa première impression est cependant une vive déception car les autorités françaises "avaient le mauvais goût de célébrer en grande pompe le centenaire de la prise de la ville, sous les yeux des vaincus dont on peut imaginer les sentiments …". On comprend que l'auteur vitupère contre l'arrogance de nombre de ses compatriotes vis-à-vis de l'islam. Il connaîtra les massacres de Sétif en 1945. Puis ce sera la guerre d'Algérie, où il sera aumônier militaire, et l'engagement de l'auteur pour la cause indépendantiste. Un très fort témoignage.

Informations

Sociedad unitaria universalista de España (SUUE)

Suite au Parlement des religions du Monde qui s'est tenue à Barcelone en juillet 2004 (voir nos bulletins n°29 de mars, n° 33 de juillet et n° 34 d'août 2004), la Catalogne a de nouveau organisé, toujours à Barcelone, une rencontre du même genre, mais cette fois-ci au seul niveau régional. 800 personnes y participèrent, des chrétiens de tout bord, des juifs, des musulmans, des sikhs, des baha'is, des "new-age", des wiccans (neo-païens), etc. A cette occasion la congrégation UU de Barcelone a organisé un culte comportant une communion avec des fleurs (Flower Communion). Ce culte, présidé par Elizabeth Breedlove, a réuni quelques 30 personnes dont la plupart découvraient les pratiques cultuels des unitariens-universalistes. Nous avons déjà, dans nos bulletins antérieurs, attirés l'attention sur les innovations cultuelles de l'UUisme (n° 40 de février 2005 - "Les unitariens-universalistes américains partagent leurs lieux de culte", n° 42 d'avril - le réseau UU d'Amérique latine -, n° 45 de juillet - les Covenant Groups). La Flower Communion fut une innovation, en 1923, des unitariens tchèques qui, dans leurs assemblées qui s'étaient ouvertes à des agnostiques, voulurent trouver un substitut à la communion chrétienne qui serait acceptable pour tous indépendamment des croyances religieuses des uns et des autres. Les fleurs, comme symbole de la beauté de la nature et de la diversité humaine…Le Dr Norbert Capek, qui composa des hymnes unitariens, fut l'artisan de ce rite. Rappelons que cet écrivain de talent mourut dans un camps de concentration nazi en 1942.

Actualisation de la Bible

Roger Parmentier a animé cet été, deux sessions du mouvement Actualisation de la Bible (ACTUEL), en Ariège, au Mas d'Azil puis à Saverdun, sur les hérésies (Marcion, Arius, les cathares) et sur l'islam, à savoir des courants qui non pas été reconnus comme "orthodoxes" par les chrétiens. Mais ces exclus avaient-ils tort ? N'ont-ils pas posés de "bonnes" questions qui restent d'actualité ?

Libres propos

Construire l’école du libre examen

Extrait de l'éditorial du n° 39 du bulletin trimestriel CALepins
envoyé au réseau par Pierre Bailleux.

Face aux fanatismes, au dogmatisme qui entraînent des gens dans la spirale de la plus grande violence et en fait des martyrs, notre devoir est d’expliquer, d’enseigner, de former et de forger des opinions. Ceci ne peut se faire que par le dialogue et en dehors des idées préconçues.

Le libre examen est le creuset parfait qui contient en lui ces diverses facettes. Il constitue la méthode idoine qui permet à chacun, à la lumière des diverses informations récoltées et - surtout – vérifiées, de se forger une opinion en dehors de toute contrainte de pensée.

Il permet à l’homme de se grandir puisque les questions qu’il pose en amènent d’autres et que rien n’est jamais acquis hormis la confrontation des idées.

Michel Herpigny, président du Centre d’action laïque (CAL) du Brabant wallon,

 

Louanges à Dieu et confiance en Jésus

Jean-Claude Barbier, septembre 2003

Dieu, créateur du monde, qui nous a donné la vie,
Il n’est pas fait de la main des hommes et n'est pas le fruit de leur imagination
Il n’appartient à personne, que ce soient les juifs, les chrétiens, les musulmans ou les païens
Il est au-dessus de nos pratiques magiques ou religieuses.
Ne le mêlons pas à nos opportunités ;
ne lui demandons pas de réaliser, à notre place, ce que nous avons à faire.
Il EST pour tous les vivants.
Nous lui adressons nos louanges.

Jésus est né à Nazareth, de Joseph et de Marie, disent les évangiles
Il est de la coutume juive.
Il a vécu sa tradition avec intelligence et sagesse,
sachant éviter les pratiques excessives et le tribalisme.
Il a annoncé le royaume de Dieu pour nous tous.
Comme seules conditions : la foi et l’amour du prochain.
Ses disciples ont témoigné qu'il avait agi comme oint d’Israël
Il a été crucifié par les Romains.
Sa pensée n’est la propriété de personne,
en sa compagnie nous sommes avec Dieu

Le baptême chrétien nous invite à renoncer à nos péchés,
mais non à notre culture.
Chacun est invité au repas des disciples de Jésus,
sans aucune exclusive, d’âge, de sexe, de rang social, de culture ou de religion.
Pratiquons le lavement des pieds selon son appel
pour que nous soyons serviteurs les uns des autres.

Nous sommes disciples de Jésus car nous l’aimons,
nous aimons nos frères et sœurs du monde entier
comme il nous l’a demandé.
Nous devons régler nos conflits sans nulle haine.
Nous pratiquons son enseignement.
Avec lui, nous vivons notre coutume avec sagesse.

Cahiers Michel Servet

édités par l'Assemblée fraternelle des chrétiens unitariens (AFCU)
et diffusés par le réseau francophone "Correspondance unitarienne"

Le n° 1 de cette série, intitulé "Le culte chrétien de maison : le partage de la parole, du pain et du vin avec des amis et des voisins", va être réédité, enrichi de deux articles : "Le décloisonnement des rôles cultuels" (communication de J.-C. Barbier à la journée de l'European Liberal Protestant Network organisée à Cluj-Napoca, en Transylvanie, le 21 juillet 2005) et l'appel en date du 3 octobre 2005 du mouvement international Nous sommes Eglise (IMWAC) au synode des évêques de l'Eglise catholique réunis à Rome pour un synode sur l'eucharistie. Les commandes sont à passer au plus vite, au prix de 5 euros l'exemplaire.

Histoire vraie pour méditer sur nos cérémonies

Un enterrement de luxe, ou la splendeur de Joseph quelque part dans un village des Pyrénées françaises

Il était petit, rondouillard, bavard, roublard, aimait la chasse et le rugby et plutôt sympathique d’abord ; il était aussi affecté d’une hépatite cirrhogène dont il décéda. Pieusement étendu sous un drap blanc brodé, avec sur le ventre un Christ en croix assorti d’une rose et d’un chapelet ; la tête de son lit, en tôle, était ornée de deux volutes crèmes lui faisant comme une double auréole interrogative.

La porte à côté de la chambre, c’est celle du bistrot ; une douzaine de personnes, à peine tristounettes et qui parlaient du temps qu’il faisait, qu’il avait fait, qu’il fera … ou d’autres choses. J.F., son fils, exposait vigoureusement et dans l’embrouille la plus obscure ses démêlés avec son patron … et dont il s’était bien entendu glorieusement sorti. L., sa mère, en noir d’épouse - mais sans tablier ce jour là - jacassait mezza voce avec d’autres veuves, tristes peut-être, mais fort modérément. Plus loin, on parlait chasse, plantation de topinambours pour nourrir les sangliers, ce qui finalement n’aurait pas déplu à Joseph. Comme on sait vivre, on avait le choix entre vin rouge (marque Valdor), café (par expérience : “ non, merci ”) ; j’ai préféré la limonade et m’en fus après avoir serré toutes les paluches disponibles en bafouillant une vague compassion.

Joseph était un brave homme - opinion vigoureusement contestée par certains, “ une sale bête ” disent-ils - né il y a 80 ans dans la maison où il venait de mourir ; forgeron de son métier, comme son père et son grand-père et dont les trois épouses respectives furent bistrotières avant de décéder . L., la sienne, le fut également et de surcroît cuisinière de l’auberge qu’il avait ouvert. Ses énormes beignets tapissent encore de gras joues et dents des clients et des quelques touristes de passage ; lui n’en mangeait pas.

L’enterrement était prévu pour le lendemain et le glas qui doublait l’Angélus méridien et vespéral le rappelait à tous. On avait dit à quatre heures … mais l’afflux commença une heure plus tôt “ pour avoir une place assise ”, comme le disent les habitués des shows funéraires. Prudent vis-à-vis de mon arthrose vertébrale et non sans avoir signé le registre de condoléances, je me trouvais, dès moins le quart, à l’intérieur de l’église, à côté du gendarme retraité ; lui chante en basse, moi en baryton, le reste en sourdine.

À quatre heures, le curé arriva, soutane blanche pliée sous le bras, missel à la main, suivi de son harem de bonnes sœurs. Serrements de main, habillage en sacristie et retour de blanc chasublé, mais cette fois précédé d’un conseil municipal - bedeau portant haut un christ en croix et en bas un fessier rebondi. Re-glas et départ des deux officiants vers l’avant dernière demeure du cujus.

Nous, on attendait … en silence, de moins en moins silencieux au fil des minutes, les conversations familiales reprenaient, les bonnes sœurs papillonnaient, les vieux copains se reconnaissaient ; tout allait encore bien … jusque vers le quart. A vingt, l’inquiétude sourdait : le mort réveillé ? le corbillard en panne ou en perdition ? le chauffeur soûl ? Satan ? A la demie de quatre heures, enfin retour du clergé et de son bedeau suivi … d’un chariot à roulettes tout inox et tout plastique, extrait d’un casier ad-hoc installé dans un éblouissant break Mercedes, crème et marron, capitonné de velours, d’où le chauffeur extirpa … une bière d’au moins 30 000 FF qu’un président de la République n’aurait pu refuser. Pas une bière d’ailleurs , mais un monument, genre pyramide ou cathédrale. Au moins 150 kg de chêne, un couvercle en quatre épaisseurs en degrés, du bronze, du cuivre, des plaques, des poignées dorées, des ferrures napoléoniennes, le tout s’élevant vers le méplat central où reposait la gerbe. Que dis-je, la gerbe ? non, un jardin floral éclatant de corolles et de verdure, agrémenté d’une écharpe rouge lettrée d’or. Et sur chaque flanc de la bière, un panneau sculpté en ronde bosse de près d’un mètre de long plein de personnages occupés, je pense, à une autre mise au tombeau, mais que les rapides roulettes dérobèrent à mon admirative et béate curiosité ! Finis les habituels porteurs et les classiques faux-pas à l’entrée de l’église, finie la bière qui tangue, finis les chevalets noirs devant le cœur, et le drap noir qui le recouvre. Le cercueil était gigantesque, éclatant, étouffant sous sa vanité ostentatoire, le pauvre corps de Joseph. Vanitas vanitatum …

Et le retard ? Simple oubli du chauffeur venu sans sa bière au bistrot (un comble pour un bistrotier !) où le corps de Joseph attendait. Vengeance du ciel pour ceux qui avaient méprisé l’habituel menuisier du village voisin ?

La foule - 200 personnes au moins - assommée de luxe n’en suivit pas moins religieusement l’office, récita l’Ave et le Pater, mais communia peu : on n’était pas venu pour ça. On lut beaucoup de textes, dont l’un d’une dame en tailleur-pantalon pailleté d’écailles de poisson rouge cyanosé du plus bel effet. Heureusement, les chanteurs réussirent par leurs organes à couvrir complètement le fausset de la bonne sœur. Les messieurs canitieux et calvicieux dominaient ; les dames, elles, étaient châtains à tendance henné. Un seul couac, l’effondrement subi du gardien de prison récemment immigré : brouhaha, bousculade, mise en position de sécurité … et résurrection à mon arrivée ! Exeat du flagada et envoi au cardiologue.

Dernière observation sociologique, les billets de 5 euros n’étaient pas rares dans la sébile. La sortie du catafalque n’a pas été applaudie, mais le glas a repris pour accompagner Joseph vers son destin de terrien. His game was over, as usual.

signé Le Boiteux