LIBRE PENSÉE CHRÉTIENNE
   janvier 2005

À quoi voulons-nous résister ?


À l’immobilisme traditionaliste et conservateur qui a pour conséquence que le discours de l’Eglise ne passe plus.

Ce qui renforce la difficulté, c’est que les traditionalistes sont de bonne foi quand ils pensent devoir conserver les formules du passé pour être fidèles à l’Eglise, à la foi, à la religion, à Jésus…Or, la tradition n'est pas de dire ce que nos pères ont dit mais ce qu’ils auraient dit s’ils avaient vécu aujourd’hui.

Une autre difficulté réside dans le fait que beaucoup de chrétiens progressistes « quittent sur la pointe des pieds » selon l’expression bien connue. Et ceci a pour conséquence que ceux qui « restent » sont majoritairement conservateurs.

Pour résister de manière constructive, il faut agir positivement. Nous avons bénéficié du travail accompli par de nombreux pionniers avant nous. Je voudrais particulièrement en citer deux. Le premier est le père dominicain Jean-Pierre Charlier, exégète, qui nous a aidés à comprendre correctement la Bible et à nous débarrasser d’interprétations fondamentalistes, c'est-à-dire littérales et historicisantes. Le second est Marcel Legaut, maître de spiritualité, qui nous a aidés à découvrir la fidélité à Jésus, au-delà de tout ce que notre religion a ajouté, modifié, oublié, déformé au cours des siècles…

Pour concrétiser cette résistance constructive, nous essayons de vulgariser, c.à.d. de simplifier et de mettre à la portée des non-spécialistes le travail qui est fait par des historiens, exégètes, théologiens, philosophes et autres maîtres de la spiritualité.

Voici un exemple très important, puisqu’il concerne ce que beaucoup considèrent comme le centre de notre foi, à savoir, la Résurrection du Christ.

Combien de chrétiens, encore aujourd’hui, n’ont jamais entendu qu’il y a deux sens différents du mot résurrection. Le premier, le sens habituel, signifie la réanimation du cadavre et le retour à la vie antérieure, telle qu’elle était avant la mort. Ce n’est pas le cas de la Résurrection du Christ. Le second sens est le retour à une Vie toute autre, qui est la vie même de Dieu, une vie dans l’Esprit. Et là, c’est le cas de la Résurrection du Christ. Il ne s’agit donc pas d’interpréter les récits d’apparition du Ressuscité au sens littéral ou matériel.

Si Marie-Madeleine et les Apôtres ont « vu » Jésus, c’est avec les yeux de la foi, pas avec leurs yeux de chair.

Il est évident que nous ne pouvons plus confondre l’objet de notre foi avec les croyances d’une autre époque. On voit de suite que le chantier est vaste : le péché originel, l’immaculée conception, la virginité physique de Marie, les miracles, etc.

Pour rassurer les hésitants, nous aimons attirer l’attention sur les leçons du passé, comme par exemple les affaires Galilée et Darwin. En effet, il est beaucoup plus à la gloire de Dieu de créer l’humanité par cette merveilleuse évolution des espèces dont parlent les scientifiques, que par la manière anthropomorphique du récit de la Genèse.

Vous pouvez comprendre combien cela nous fait souffrir de voir ceux que nous aimons « quitter sur la pointe des pieds » à cause d’un discours désuet qui n’est plus crédible. Vous pouvez comprendre aussi notre joie et notre enthousiasme dans la résistance constructive à un conservatisme de bonne foi mais mal informé.

André Verheyen, janvier 2005

Cet article a été publié dans les Notes de travail de l’A.C.I. (Agir en Chrétiens Informés)