Comme dans toute famille bien
formatée,
les noëls de mon enfance étaient inconcevables
sans sapin enguirlandé et illuminé, sans crèche,
sans cadeaux et sans cougnous. Un Père Noël par-ci,
un bonhomme de neige par-là, des anges musiciens, quelques
bougies, des rubans et l’une ou l’autre comète
venaient compléter le tableau : la magie était
installée jusqu’au lendemain de l’Épiphanie.
Je suis à présent athée et le récit
de la Nativité que je tenais pour vrai autrefois, a
tout naturellement trouvé sa place dans mon livre de
fables et de légendes, dans ma mémoire des mythes
si précieux parce que riches en enseignements et en
informations sur l’évolution des mentalités.
Et pourtant, comme par le passé, je
décore la
maison et l’arbre de Noël en écoutant les
chants traditionnels et les cantiques de circonstance. Dans
une bonbonnière, une crèche miniature apparaît,
composée de figurines de galettes des Rois, mais avec
deux petits Jésus, deux Joseph et deux ânes – on
ne choisit pas ses fèves – sous l’œil
malicieux d’un Père Noël flanqué de
chérubins.
Noël, pour moi, c’est une tradition
qui se situe en-dehors de toute croyance ou ferveur religieuse.
Pour reprendre
l’exemple d’André Gounelle, c’est
La flûte enchantée toujours réécoutée
avec le même plaisir bien que différente à chaque
fois, dont il n’est pas utile de gommer l’histoire
fantastique pourtant un peu pâlotte sans la musique
qui l’enrichit, qui fait vibrer ses mots et briller
ses étoiles.
Quelle que soit la forme littéraire
employée,
les rédacteurs des Évangiles ont clairement
souhaité communiquer
quelque chose à un moment donné. Que ce quelque
chose puisse, aujourd’hui, fonder ou traduire une foi
en un personnage, peut-être mythique lui aussi, est
affaire individuelle et privée.
Tous les mythes, tous les contes sont porteurs de messages
et sujets à interprétation.
Leur étude
est édifiante, comme l’est l’analyse de
la « fantasmagorie » symbolique de l’opéra
de Mozart. Pour poursuivre dans cet exemple et pour décliner
la comparaison, ce que l’on éprouve vivement
pendant l’écoute – le ressenti – ne
vient pas du texte, même si on l’a décortiqué,
mais de la musique qui, finalement, n’a rien à voir
avec les livrets, les mythes, les paroles qu’elle magnifie
peut-être mais sans les expliquer. La musique nous
touche sans détours, sans référence à un
quelconque contenu, sans besoin d’exégèse.
Elle ne dit rien mais fait « sentir des choses » :
c’est une expérience personnelle et directe,
singulière
et surprenante, incommunicable aussi car elle ne porte, en
soi, aucun message.
Noël n’aurait que peu d’attrait
sans son habillage scintillant et ses trésors pourtant
sans grand rapport avec les mythes et leur signification
supposée.
Elle est devenue une fête centrée sur la famille
et les enfants, elle réenchante et rappelle à notre
petit monde étroit qu’il peut encore s’émerveiller.
Et peu importe, enfin, qu’elle trouve son origine dans
la commémoration de la naissance de Jésus ou
de celle de Mithra, dans la célébration de
la fin de l’année solaire ou de quelque dieu
païen…
Merveilleux Noël à tous, croyants,
agnostiques, athées… et joyeux solstice d’hiver
2006.
Nadine de Vos, le 22 décembre
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