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 Les chroniques



    Etienne Godinot

 

Editions du Relié (Poche),
2005, 408 p., 12 €

 

   

 


Dictionnaire de la non-violence

 

 

Philosophe de formation, Jean-Marie Muller a élaboré durant les trente-cinq dernières années une œuvre abondante toute entière consacrée à la réflexion sur la non-violence et aux grandes figures qui ont illustré ce mode d’action. Dans le même temps, il s’est impliqué dans nombre d’actions militantes à travers le monde. Auteur en 1988 d’un Lexique de la non-violence, il publie aujourd’hui ce Dictionnaire dans lequel cent huit mots-clefs, d’une grande clarté malgré leur densité, constituent à la fois « un traité de la philosophie de la non-violence » et un « manuel pratique de l’action non-violente».

J.-M. Muller, qui s’en explique dans l’introduction, a pris le parti de ne faire aucune citation d’auteur, et de ne pas donner d’exemples pour illustrer la description des méthodes de l’action non-violente, ce qui l’a obligé à plus de rigueur dans la réflexion. L’auteur recourt également beaucoup et avec pertinence à l’étymologie des mots.

Toute une culture de la non-violence se trouve ici présentée pour dénoncer l’idéologie de la violence qui fait croire que la violence est immanente à l’action humaine et qu’elle est nécessaire pour agir efficacement contre l’oppression ou l’injustice.

Ce qui frappe à la lecture de ce traité, c’est la convergence des définitions pour conjuguer de façon réaliste l’exigence morale et l’attitude responsable et efficace. Comme l’écrit l’auteur, « il existe un lien essentiel entre le mot juste, la pensée juste et l’action juste ». Philosophie et stratégie, pensée et action sont intimement imbriquées, et cette articulation féconde demeure en filigrane de tous les articles du dictionnaire.

Cet ouvrage, dont les articles peuvent se lire indépendamment, à petites doses, est une mine pour l’information et pour la réflexion. On peut certes formuler quelques regrets, pas seulement à propos du dessin de la couverture, deux colombes au bord de l’eau… Le concept de contre-violence, évoqué dans les chapitres Efficacité, Nécessité, Police, Résistance, Violence, aurait mérité un chapitre spécifique. De même, la communication non-violente, qui évoque un état d’esprit, des règles, des méthodes intéressantes et utiles, mériterait un chapitre séparé qui reprendrait les grands thèmes évoqués par exemple par Marshall Rosenberg ou Thomas d’Anzembourg.
Il reste que J.-M. Muller a signé un ouvrage majeur, à lire et à faire lire à tous ceux qui cherchent et inventent des alternatives à la violence omniprésente dans nos sociétés.

Etienne Godinot, 5 novembre 2005