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Bible et Liberté |
Lire la Bible - 2. Une bibliothèque |
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Destin unique que celui de ce livre dans l’histoire
de la culture occidentale. Que n’a-t-on pas dit (de vrai et de faux)
sur la Bible à travers les siècles! Aucun livre de notre
tradition culturelle et religieuse occidentale n’a été
autant traduit, diffusé, célébré, commenté,
prôné que ce texte-là. Tour à tour Bible en
images, Bible racontée aux enfants, Bible édifiante, Bible
des canons ecclésiastiques, Parole divine, Parole de salut... ou
bien encore: collection de textes orientaux, sémitiques, objet
d’études savantes comme tous les anciens documents, témoins
d’anciennes croyances ou d’une ancienne littérature. Bible tellement «connue» de ceux qui ne l’ont jamais lue qu’on lui prête parfois des clichés qui lui sont étrangers. Tout le monde connaît l’histoire de la «pomme d’Adam» ou de la «baleine de Jonas», bien que le texte biblique n’ait jamais parlé ni de pomme, ni de baleine ! Et ne dit-on pas d’une évidence particulièrement banale : «c’est écrit dans la Bible»… Ainsi, la Bible, corpus canonique ou corpus documentaire, a été, au cours des siècles, captive des usages qui en ont été faits. Autre paradoxe : La Bible est le seul des livres fondateurs
de notre culture qui n’en pas été un produit. Comme une rivière dont la source se situe loin
du lieu de naissance des rivières qui alimentent le grand fleuve
de notre civilisation. Cette bibliothèque orientale est née
hors des territoires gréco-latins où s’enracinent
nos références culturelles. L’expression «la Bible» est déjà intéressante. Le mot vient du latin «Biblia» : un mot qui été compris comme un féminin singulier. De là les traductions modernes usuelles: La Bible, die Bibel, la Biblia, etc. Pourtant le terme latin ne faisait que décalquer l’expression grecque: «ta biblia» (pluriel neutre), c’est à dire: «Les livres» (les livres saints, les livres sacrés).De fait, «la» Bible n’est pas un livre, mais une bibliothèque. Et cette bibliothèque orientale et poétique est composée de livres différents, d’auteurs différents, d’époques différentes, de genres littéraires bien différents… Il est vrai que le genre littéraire, le ton particulier, la langue même sont régulièrement gommés par la traduction. Le «style biblique» est largement une création des traductions. Dans le même temps, la bibliothèque orientale est devenue ce livre unique qui est une des sources de notre culture. Jacques Chopineau, Lire la Bible, Ed. de l'Alliance, Lillois, 1993, p.6-7 |