CORRESPONDANCE UNITARIENNE    mai 2004

L'Encyclique et le Cénacle

Actualités
unitariennes


n° 31

« Nous éprouvons le Christ ressuscité à l'intérieur de nous-même.
Croire en lui, c'est vouloir lui ressembler en ce qu'il a été ici-bas ;
c'est souhaiter d'être inspiré par lui pour l'accomplissement de la justice et le triomphe de l'amour. »
Michel Servet
(texte communiqué par Robert Bordin à La Lettre des Amis, mars 2004 p. 9)

L'Encyclique et le Cénacle
présentée par François Trubert,
« un laïc sans qualification », Pont-Aven, le 5 octobre 2003
Cette méditation est personnelle,
et ne saurait engager aucun des groupes ou associations auxquelles j'adhère.
Courriel 

Je viens de lire l'encyclique Ecclesia de eucharistia. L'essentiel était déjà dans mon petit catéchisme. C'est le rôle du magistère de rappeler la doctrine mais je croyais, qu'entre temps, il y avait eu un concile consacré à l'aggiornamento…

Eucharistie solitaire ou acte communautaire ?

Pourtant quelque chose a changé ; mes maîtres m'avaient appris que l'eucharistie avait obligatoirement un aspect communautaire ; c'était à l'époque de Pie XII et tous portaient la soutane. Ils enseignaient qu'un prêtre ne pouvait pas célébrer valablement en l'absence de fidèles. Je me souviens de l'exemple de Charles de Foucault, isolé géographiquement de tout groupe chrétien, qui ne pouvait célébrer.
Ceci n'est plus valable : «  On comprend l'importance pour la vie spirituelle du prêtre … de célébrer quotidiennement l'eucharistie qui est vraiment, même s'il ne peut y avoir la présence de fidèles, action du Christ et de l'Eglise » (p. 31). Chacun reste libre de méditer sur le sens de : « les fidèles, pour leur part, en vertu de leur sacerdoce royal, concourent à l'offrande de l'eucharistie » (28). Une des grandes réformes de Vatican II, pour la liturgie, a été la réintroduction de la concélébration dans l'Eglise d'Occident, or cette dimension collégiale n'apparaît pas dans l'encyclique où « c'est le prêtre ordonné qui célèbre le sacrifice au nom de tout le peuple » (p. 28).

Ceux-là …

Jean-Paul nous apprend qu'il a eu la joie de célébrer à l'endroit où la tradition place le cénacle ; anecdote ? C'est à voir. C'est vrai qu'il a dû être sympathique ce repas au cénacle. La journée avait été fatigante mais pour une fois Joshwah s'était laissé acclamer par la foule en tant que fils de David. On se retrouvait entre proches pour fêter la Pesah. Les femmes veillaient à ce que rien ne manque. Au cours du repas, le seigneur a partagé le pain. C'était un geste bien connu mais cette fois il a prononcé des paroles difficiles. Avec lui, on était habitué. Un jour Cephas lui a dit : « Ces paroles sont dures. Qui donc pourrait les accepter ? ». Pourtant tout le groupe s'est senti soudé autour du Christ. Un peu plus tard, il a fait circuler la coupe de vin : « Ceci est mon sang qui sera répandu pour vous et pour la multitude ». Toujours l'annonce de la souffrance et ce besoin d'élargir le groupe, de s'ouvrir à ceux qui ne sont pas des nôtres.

Un jour, Johann, le bien aimé, vient lui dire : « Il y a quelqu'un qui chasse les démons en ton nom. Nous avons voulu l'en empêcher car il n'est pas de ceux qui nous suivent. » Joshwah : « Laissez le faire…Qui n'est pas contre nous est avec nous ». Il y avait eu aussi les enfants turbulents, l'aveugle de Jéricho, la Cananéenne. A chaque fois, Joshwah accueillait le gêneur, au point qu'on avait plus le temps de manger ni de dormir.

Cette fois aussi où les disciples avaient laissé le Maître se reposer à l'ombre. Leur surprise de le trouver en conversation avec une femme… Et quelle femme ! La soirée chez Zachée ; la gêne de se trouver chez ce réprouvé, obligés de lui faire bonne figure et de partager son repas puisque le Seigneur l'avait décidé. « Les prostituées et les trafiquants entreront avant vous dans le Royaume ».

Enfin, ce soir on était entre soi. On était dans la chaleur de l'amitié. On pouvait faire de la musique et chanter ensemble (p. 47)… Jusqu'au moment où il a fallu sortir. Après, on s'est retrouvé dans la grande pièce. On fermait les portes par peur des Juifs. Deux ou trois fois, il s'est trouvé au milieu du groupe sans qu'on sache bien comment. Il y a eu surtout ce vent de folie de la Pentecôte. Tout d'un coup, les portes se sont ouvertes ; on a parlé à tout le monde et tout le monde comprenait. L'Esprit saisit des gens qui n'était pas des nôtres et il a bien fallu les accepter. Même ce Shaul-Paulus qui avait été l'adversaire. Depuis, sans cesse, l'Esprit pousse des prophètes à sortir du cénacle pour aller annoncer le Bon message mais sans cesse, aussi, les hommes dressent des barrières entre ceux qui sont des nôtres et ceux qui ne sont pas dans « la communion totale dans les liens de la profession de foi, des sacrements et du gouvernement ecclésiastique » (p. 44).

Celui-ci ne croit pas à l'Immaculée Conception ; cet autre pense que la femme a les mêmes prérogatives que l'homme. Celle-ci mène une vie dévergondée. Une autre a tenté de se suicider. Celui-là vit avec un autre homme, à moins que ce ne soit avec une femme divorcée. Il porte des plumes sur la tête. Elle mange des choses dégoÖtantes. Elle est fille mère. Il est circoncis ; il ne l'est pas. Ils vivent de rapines ou de trafics. Ils ne reconnaissent pas l'autorité du Pape. Leurs ministres ne sont pas ordonnés validement. «  Ils persistent avec obstination dans un péché grave et manifeste (p. 37) ».
On ne va quant même pas partager le corps du Christ avec ces gens-là. Pourtant, nul ne peut dire : « Joshwah est le Seigneur » si ce n'est sous l'action de l'Esprit Saint.

Le mystère de foi

Il est question de mystère à toutes les pages de l'encyclique mais, par définition, un mystère ne peut être enfermé dans une formulation humaine, si perfectionnée soit-elle. Les scientifiques le savent bien pour lesquels une théorie, une expression, peuvent toujours être modifiées, voire abandonnées si des éléments nouveaux apparaissent. Pourtant leurs mystères ne sont que ceux de la Création. Ici nous touchons à ceux du Créateur. Le Christ ne nous a laissé que des images, des paraboles. S'il l'avait voulu, il aurait pu faire rédiger des traités pour régler toutes les questions définitivement. Il ne l'a pas fait ; il doit y avoir une raison. « C'est moi qui suis la voie, la vérité et la vie ».

Le mystère est une invitation à approfondir notre foi par la méditation et la contemplation. De nouveaux aspects sont toujours à découvrir. Certains sans doute sont émerveillés par la transsubstantiation (p. 15). Moi, ça ne me dit rien du tout. Je n'oublie pas que le seul fait d'écrire cela aurait pu me conduire aux galères au XVIIéme siècle. Au cours des âges, combien de chrétiens, des savants et des ignorants, ont rencontré Joshwah dans l'eucharistie, combien de communautés, religieuses ou villageoises en ont nourri leur vie, dans l'Eglise romaine ou dans les multiples confessions qui ont eu des raisons de s'en séparer. Chacun, chacune, a sa vision dans son esprit et dans son coeur. L'Esprit de Dieu qui est amour souffle où il veut et il ne nous appartient pas de lui fixer des limites. « Qu'ils soient unis comme Toi et Moi nous sommes unis ». Pour conclure, je crains de ne pas accepter la vérité intégrale de la foi sur le Mystère eucharistique (p. 38).