CORRESPONDANCE UNITARIENNE | décembre 2003 |
Bonne fête de Noël et bonne année à tous | |
Dieu est partout. Il est ici. Si vous ne le trouvez pas, il est inutile d’aller le chercher ailleurs. Ce n’est pas lui qui est absent : c’est nous … ” Métropolite Antoine Bloom cité par Arc-en-Ciel, juin 2003, n° 137, mensuel des Eglises réformées de Valenciennes Fêtons Noël
avec un "dossier biblique" d'Ernest Winstein Jésus, fils de Joseph et de Marie “ Du temps de l’empereur
César Auguste… ”, c'est ainsi que commence, dans "
l'Evangile selon Luc", la présentation de l'événement
qui est à l'origine de la fête de Noël. Le “ temps
de César Auguste ” était aussi le temps où,
sur la rive gauche du Rhin, vivaient peut-être encore des tribus
celtiques, peut-être déjà des Germains venus de l’Est.
Bien plus tard, on se mit à compter les années depuis le
temps où, en Palestine, un certain Jésus, “ fils de
Joseph ” et “ de Marie ”, … vit le jour. Ben Yousef Le premier titre qui lui fût donné s’énonça
certainement ainsi : “ Yeschouah ben Yousef ”, Jésus
fils de Joseph. Dès lors qu’il venait à parcourir
son pays, il devint Jésus “ de Nazareth ” pour ceux
qui le rencontraient et ne connaissaient ni Joseph, ni Marie, mais la
ville qui l’avait vu grandir. Tout naturellement, des habitants
de Nazareth qui l’entendront lire et interpréter le prophète
Esaïe s’étonneront : “ N’est-ce pas là
le fils de Joseph ? ” (Luc 4,22)1. L'évangéliste
Matthieu l’appelle “ le fils du charpentier ” (Matthieu
13, 55)2. C’est Jean qui présente avec le plus
de naturel Jésus comme “ fils de Joseph ” : Philippe,
qui va annoncer à Nathanaël avoir trouvé celui dont
parlent les écritures, s’exclame en disant qu’il s’agit
de “ Jésus de Nazareth, fils de Joseph ” (Jean 1,45).
Jean fait encore dire aux Juifs qui murmurent au sujet de l’enseignement
de Jésus portant précisément sur les rapports entre
le Père et le Fils : “ Celui-ci n’est-il pas Jésus,
le fils de Joseph, lui dont nous connaissons le père et la mère
? ”. L’évangéliste Jean ajoute cette mention
pour marquer que Jésus, dans le rôle de “ Fils ”
du “ Père ”, est bien né d’une filiation
humaine. Etait-il
bien de Joseph… ? Le doute nous vient du fait que les évangiles de
Luc et de Matthieu, écrits aux environs des années 85 à
90, nous parlent de la naissance de Jésus comme du résultat
d’un engendrement direct de Jésus par Dieu – engendré
par l’Esprit saint, c’est-à-dire Dieu (Matthieu, chapitre
1 et Luc chapitres 1 et 2). Dans la secte juive des esséniens (les
manuscrits de la Mer Morte en témoignent) se trouvait développée
l’idée que le messie attendu pouvait n’avoir ni père,
ni mère, - tel Melchisédek, le roi de Salem (Jérusalem)
qui rencontra Abraham, (dans l’Ancien Testament en Genèse
14, 12-20 et Psaume 110,4). Il suffisait pour les chrétiens de
reprendre cette idée à leur compte - à moins qu’elle
ne fut apportée par des esséniens convertis à la
foi au “ messie ” Jésus. L’épître
aux Hébreux, qui date à peu près de la même
époque que Matthieu et Luc, présente, en effet, une tradition
très proche de celle de la naissance “ virginale ”
: Jésus est appelé “ prêtre … à
la manière de Melchisédek ” (Epître aux Hébreux
5,6 ; 5,10 ; 11,17), “qui n’a ni père, ni mère
”3. Nous dirons donc, mais que chacun se sente libre
de ses convictions : Jésus est né de Marie et, certainement
de Joseph, ses frères et sœurs étaient connus dans
l’entourage de Jésus – l’un d’eux, Jacques,
deviendra chef de l’église de Jérusalem. L’évangile
de l’enfance : une interprétation de l’événement
Jésus de Nazareth Les premiers chrétiens ne s’étaient
guère intéressés à la naissance de Jésus
: L’évangile le plus ancien, Marc, (on situe sa rédaction
entre 55 et 70) n’en parle pas et commence par évoquer Jean-Baptiste
pour présenter ensuite le récit du baptême de Jésus
(adulte) par Jean et l’appel des premiers disciples. Les textes
sur la naissance virginale, nettement plus tardifs, interprètent
l’événement Jésus de Nazareth. En somme, ils
nous apportent une confession de foi des chrétiens (de certains
chrétiens, du moins) des années 80-90, disant que la naissance
de Jésus fait partie d’une sorte de plan de Dieu. Certes,
dès que les chrétiens avancent et multiplient ce genre d’interprétation,
les contradictions s’accumulent : Si ce fut le plan de Dieu de sauver
ou de rétablir Israël dans son intégrité de
peuple élu et libre, il faut bien constater que le résultat
en est un échec, à moins de renvoyer la réalisation
de ce plan à “ plus tard ”, - un report qui dure depuis
deux mille ans ! Par contre, le message des textes demeure : Voyez comme
Dieu vous est proche ! La datation
de la naissance de Jésus Le messie devait bien, pour certains juifs, naître
à Bethléhem. On sait aussi aujourd’hui que l’événement
de la naissance de Jésus se situe quelques 4 à 6 ans avant
l’année fixée comme étant la “ première
” (d’après les recherches sérieuses faites en
la matière). L’incertitude est encore plus grande quant au
jour de l’année et l’on sait que les églises
orientales ont gardé l’épiphanie comme jour anniversaire.
Le rôle de la lumière renaissante dans les fêtes pré-chrétiennes
ainsi remplacées par Noël est évident dans le choix
porté sur le 25 décembre. Mais si le doute est justifié
à propos de la date, n’est-ce pas à l’avantage
de l’importance de Jésus pour nous ? Qu’il est bon
de pouvoir penser que chaque jour de l’année peut être
celui de la naissance de Jésus, si nous voyons en lui ce témoin
privilégié parmi les hommes porteurs de la présence
de Dieu ! Jésus
est-il né à Bethléhem ? Quant au lieu, il paraissait simplement logique, vers la
fin du 1er siècle, que le messie soit à l’image
du roi David, originaire de Bethléhem. Quoi de plus tentant donc
de le faire naître à Bethléhem ! Rappelons que Luc
rapporte un déplacement de Joseph et de Marie de Nazareth vers
Bethléhem. Dans l’évangile selon Matthieu, qui est
légèrement postérieur à Luc, l’itinéraire
est exactement inverse! Matthieu suppose connue l’information au
sujet de la naissance de Jésus à Bethlehem et, après
avoir montré que les mages rendent hommage au vrai roi à
Bethléhem, évoque une fuite en Egypte, pour nous dire qu’après
ces péripéties Joseph et sa famille viennent s’installer
à Nazareth en Galilée (Matthieu chap. 2). Mais, en nous
basant sur les données de l’évangile le plus ancien
(Marc), on constate que la “ patrie ” de Jésus est
Nazareth et la Galilée. Si l’idée d’une naissance
à Bethléhem avait été présente dès
le début dans la tradition au sujet de Jésus on en trouverait
mention dans les textes les plus anciens. Et alors, Jésus aurait
pu être appelé “ de Bethléhem ” plutôt
que “ de Nazareth4. Si, donc, une naissance à
Bethléhem paraît tenir de la légende venant au secours
de la démonstration du caractère royal de Jésus,
la question des antécédents davidiques de Jésus peut
être examinée séparément. La fiabilité
des arbres généalogiques de Matthieu chap. 1 et de Luc 2
n’est pas très grande. Mais l’attribution à
Jésus d’un rôle messianique n’est pas une invention
postérieure. Jésus a bien été considéré
comme messie (christ), c’est justement le motif de la condamnation
que le procureur romain Pilate fait inscrire sur la croix. Certes, lorsqu’on
passe du témoignage de Marc à celui de Matthieu, nous constatons
que la tradition au sujet de Jésus évolue dans le sens d’un
renforcement du caractère royal, “ davidique ”, de
sa personne. On peut se demander si la famille, et non seulement Jésus,
n’avait pas quelque prétention au “trône”...?
Le fait que Jacques, frère de Jésus, ait pris la tête
de l’église de Jérusalem, a depuis longtemps conduit
les spécialistes des Evangiles à considérer la famille
de Jésus comme influente et parler d’un “ christianisme
dynastique ”4. Jésus peut donc bien être
un descendant de David, à condition que Joseph soit le père
- sinon il y aurait rupture de la chaîne royale ! Mais il est surtout
intéressant de constater qu’une des branches du christianisme
ancien a fortement souligné le caractère messianique, royal
de Jésus – ce qui explique la vigueur d’une foi en
un retour du Christ. Une autre branche, représentée par
l'évangile selon Jean, a développé des “ confessions
de foi ” à charge plus symbolique : Jean parle de “
lumière du monde ”, de “ bon berger ”, de “
chemin ”, et l’image d’un Jésus grand-prêtre
gagne sur celle d’un christ-roi. Et le Christ “élevé”
revient sous forme de “consolateur” (encore appelé
"paraclet"). Déjà, à la fin du 1er
siècle, la foi est très différenciée suivant
l’église dans laquelle la tradition au sujet de Jésus
a évolué. Un Jésus
plus humain, donc plus proche Ceux qui cherchent des vérités historiques
absolument sûres risquent d’être déçus.
Mais les textes constituant l’ “ évangile de l’enfance
” nous parleront si nous les considérons pour ce qu’ils
sont : des confessions de foi de la fin du 1er siècle.
Ils vont alors nous inviter à développer notre propre confession
de foi. Nous fêtons donc un roi sans couronne et sans état
civil précis ? Ernest Winstein Notes : |
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