Le pape sourd aux appels des
fidèles
Seuls les naïfs seront déçus.
Le texte doctrinal qu'a publié hier Benoît XVI
ternira encore l'image d'une Eglise catholique rigide et
autiste. Dans ce document, le pape donne des gages à son
aile la plus conservatrice et remet au pas les progressistes.
Célibat des prêtres, divorcés-remariés,
refus de l'intercommunion avec les non-catholiques... Le
Souverain Pontife ne bouge pas d'un iota dans ces dossiers,
affichant à nouveau officiellement le déni
de réalité de l'Eglise.
Alors qu'une écrasante
majorité de catholiques
demandent l'abandon du célibat obligatoire des prêtres,
le Vatican s'accroche à cette règle parfois très
mal vécue, imposée difficilement au IVe siècle.
Chaque fois que le sujet revient sur la table, Mgr Bernard
Genoud, évêque du diocèse de Lausanne,
Genève et Fribourg, justifie l'interdiction romaine,
avant de plaider pour une forme de compromis: l'ordination
de viri probati, ces hommes mariés qui ont fait leurs
preuves dans l'Eglise. Mais c'est là pure rhétorique.
Autre dossier sur lequel le pape se montre
intransigeant: le refus de la communion aux divorcés
remariés.
Que l'Eglise exalte le mariage est naturel. Mais stigmatiser
ceux qui échouent, c'est fermer la porte à près
d'un couple sur deux sous nos latitudes. Situation difficile,
un bon divorce vaut pourtant mieux qu'un mauvais mariage.
Bon prince, le pape accepte la communion pour les couples
recomposés à condition
qu'ils vivent comme des amis, comme frères et soeurs.
Une incongruité qui en rappelle une
autre: l'Eglise tolère l'homosexualité et les
homosexuels, pas l'acte homosexuel. A ce propos, le pape
officialise dans
son
texte l'ingérence de l'Eglise dans les débats
politiques sur les unions libres – une discussion des
plus brûlantes dans la très catholique Italie.
Ou sur l'euthanasie. Cette ingérence serait de bonne
guerre si elle n'en devenait indécente.
Alors que
Maurice Papon était comparé au Christ par le
curé qui
l'a enterré, ou qu'Augusto Pinochet recevait des funérailles
religieuses, ce dernier honneur était refusé à l'Italien
Piergorgio Welby, qui avait obtenu d'être euthanasié.
Serrant d'un côté la vis, le Vatican
multiplie les signes d'ouverture envers les plus réactionnaires,
interdisant des «innovations» liturgiques qui
rendent pourtant la messe plus attrayante. En attendant de
libéraliser
la messe tridentine – une main tendue aux intégristes
lefebvristes qui n'ont jamais digéré l'aggiornamento
du Concile Vatican II –, il demande que les prières
les plus connues soient récitées en latin.
Comment dit-on «arrière toute!» dans
cette langue morte?
Richad Armanios, article paru
dans le journal catholique suisse Le
courrier, 14 Mars 2007
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