Résistance
et / ou terrorisme
Depuis
le commencement du monde, lorsqu’il y a une
occupation, naît aussi une résistance à cette
occupation. Il y a aussi, parfois, des collaborateurs de
toutes sortes,
actifs ou passifs, convaincus ou résignés. Dans
ce cas, l’attentisme « réaliste » des
uns s’oppose à l’ « irréalisme » activiste
des autres. Le réalisme des uns n’est pas celui
des autres.
Le vainqueur a finalement raison –au
terme d’une
lutte acharnée et, parfois longue. Mais aussi longtemps
que dure la guerre : actions d’éclat et
abominations sont le lot du quotidien. Voilà qui n’est
pas nouveau.
Ce qui est clair, c’est que les résistants
peuvent être
appelés « terroristes » par
l’occupant
maître du terrain. Violences et contre-violences s’additionnent –lors
même qu’elles changent de nom. Pour autant, on
ne peut renvoyer dos à dos, l’occupant et l’occupé,
l’agresseur et l’agressé.
C’est
pourtant ce que fait l’occident, avec l’hypocrite
bonne conscience que donnent les belles paroles, les nobles
assurances, les grandes pétitions de principe. Certes,
nous sommes pour la paix et contre la violence. Mais là où la
violence règne, les prises de position purement verbales
n’y changeront rien.
Des populations privées
de tout (et même d’eau
et d’électrité -comme à Gaza)
ne sont certainement pas portées à admirer
les grands états « démocratiques » et
indifférents. Il ne manque pas de milieux, dans le
monde arabe, où l’expression « démocratie
occidentale » est péjorative.
Comment en
est-on arrivé là ?
La violence est fille
de la violence
La violence, toujours, engendre la
violence. On ne peut, évidemment,
approuver la violence, d’où qu’elle vienne.
Mais il faut connaître les causes véritables
de cette violence.
D’ailleurs, la violence des forts
ne porte pas le nom de violence. Dans la terminologie des
puissants, il s’agit
plutôt de « juste cause » ou
de « nécessaire
défense ».
Il en va de même pour
la sainte lutte contre un démon
nommé « terrorisme ». L’ennemi
malin semble avoir pris la place de l’ancien Diable
rouge –du
temps de la subversion communiste.
Ce qui est évident,
c’est que l’on a jamais,
nulle part, pu fonder une paix durable sur l’occupation
et la domination. L’humiliation engendre toujours le
désir de faire cesser cette humiliation. Et le désespoir
ne mène pas toujours à la résignation,
même si le rapport de forces est aujourd’hui
favorable à l’occupant.
Mais il faut aller plus loin que cette évidence.
Il
est clair que les parents et amis d’un tué –et
même d’un emprisonné à vie- ne
se résigneront jamais à cette absence. Et si
la Loi est celle du plus fort, on peut rêver qu’elle
soit, un jour, changée. Elle le sera, d’ailleurs,
mais au prix de combien de souffrances ?
En attendant,
aux représailles répondent les
contre-représailles Et les attentats (arme des faibles)
répondent aux glorieuses ( ?) actions militaires
(arme des forts). Mais, dans tous les cas, il importe de
comprendre que gagner la guerre ne signifie pas gagner la
paix. Voilà ce
que les vainqueurs oublient toujours.
Le monde complice
Voir quelqu’un être
agressé et ne pas lui
porter secours : cela porte le nom de non-assistance.
Et si le spectateur n’est pas en état d’intervenir :
il peut
du moins appeler « au secours ».
Mais s’il ne dit rien : il porte une part de responsabilité dans
l’agression.
C’est dans ce cas que –depuis
des années-
notre bel Occident est témoin de l’occupation
et des spolations de toutes sortes subies par le peuple palestinien.
Il entre, sans doute, dans ce silence, la honte de l’épouvantable
holocauste qui a jadis frappé les européens
juifs. Les nazis ont d’ailleurs trouvé beaucoup
de complices dans les pays d’Europe occupée.
Et plus encore, de silence complice…
En ce temps-là furent écrites
des pages noires de l’histoire européenne.
Et
l’on peut comprendre
que la naissance du petit état juif ait été perçue
comme une belle renaissance d’une ancienne espérance.
Mais il faut rappeler que les palestiniens
ne furent pas les coupables de cette ignominie. Pourtant,
tout se passe
comme
s’ils devaient payer pour des fautes européennes.
En sorte que le peuple martyr, aujourd’hui,
est concrètement
le peuple palestinien. Peuple occupé, spolié,
humilié et –s’il tente de se défendre-
qualifié de terroriste.
Dans cette situation, il faut
dénoncer le conformisme
d’une grande partie de la presse européenne.
Pour ne rien dire du suivisme ou de l’ignorance d’une
télévision qui conforte les préjugés
régnants. Médiocrité aussi de beaucoup
de discours politiques. Pire encore : beaucoup de responsables
politiques semblent ignorer l’urgence du problème.
Dénonçons les propos « cache-misère »,
tant de fois entendus. Il ne sert à rien de proclamer
qu’on est « pour la paix » et « contre
le terrorisme ». Le désespoir crée
du terrorisme. Nos anciens disaient : « on
ne peut pas mâcher amer et cracher doux ».
De même, entend-on, il faut négocier.
Mais a-t-on jamais vu une négociation entre le gibier
et son prédateur ?
Les conditions d’une
paix durable ne sont pas réunies.
Malgré les discours qui mettent en avant une illusoire « feuille
de route » et des accords, signés mais
non respectés. Il n’y a jamais eu de « processus
de paix », sauf si l’on entend par là une
soumission à la loi du plus fort. Rappelons que les
accords d’Oslo n’ont jamais interdit à de
nouvelles colonies de voir le jour.
De qui se moque-t-on ?
Certes, Israël a le droit de vivre. Mais
les palestiniens aussi ont le droit de vivre. La question
est : où ?
En quel lieu ? Car tous les humains, de chair et de
sang, ont besoin d’un lieu. où vivre. Et ce
lieu palestinien est aujourd’hui de plus en plus réduit
et morcelé.
A-t-on jamais imaginé un état sans souveraineté réelle,
sans frontières respectées, et –bien
entendu- sans armée. Un état ? Oui, peut-être,
mais impuissant, dépendant, soumis, sous contrôle…
Je
ne doute pas qu’il existe des israéliens conscients
de cette injustice fondamentale. Et naturellement, de nombreux
juifs de par le monde.
Mais, au point où nous en
sommes, il faut qu’ils se fassent entendre.
Pour que
s’établisse
cette justice qui est le seul terrain sur lequel la paix
peut se fonder.
Jacques Chopineau, Genappe, le 7 juillet
2006 |