« Ein Reich,
ein Volk, ein Fürher ! »
Ces
paroles hurlées dans un
stade comble, acclamées par la foule envoûtée,
résonnent à jamais dans les mémoires. Notre
vigilance doit tenir compte des dérives de notre
histoire : la soumission à la pensée unique,
c'est le cimetière de la pensée humaniste.
Le démocrate affiche
sa tolérance, cette belle vertu dont Emile Boutroux
dit qu'elle est la "reconnaissance de la valeur qui
appartient à la personnalité d'autrui, en cela
même par où elle diffère de la nôtre".
Voilà qui est louable et c'est justement
cette reconnaissance de la valeur de
la diversité, de l'altérité, que nous
avons à préserver par le refus du discours
réducteur de ceux qui prétendent instaurer
la paix et l'harmonie en alignant tout le monde sous la même
bannière.
Il est vrai que l'actuel
manque de répères dans notre société induit
la tentation totalitaire, perçue comme un refuge
sécurisant. C'est perdre de vue le fait que cette
uniformisation voulue par l'extrême-droite suspend
les libertés individuelles et collectives inscrites
dans nos démocraties. Et cela, nous ne pouvons le
tolérer.
Il est des catastrophes prévisibles
et évitables. La démocratie est fragile, jamais
acquise définitivement. Elle est comme un temple de
pur cristal qu'un tsunami idélogique peut irrémédiablement
saccager.
Notre tolérance s'arrête au
seuil de la menace à l'égard des libertés
démocratiques; c'est la passivité à l'égard
de l'intolérable qui fait le lit des dictatures. "On
aurait pu dire non", écrit Franck Pavlov dans Matin
brun, où il décrit la lente et sournoise
montée de la peste brune. "On aurait pu dire
non. Résister davantage, mais comment ? Ça
va si vite, il y a le boulot, les soucis de tous les jours.
Les autres qui baissent les bras pour être un peu tranquilles,
non ?"
Sait-on assez où risquent de nous
mener collectivement les petites lâchetés de
chacun d'entre nous ?
Béatrice Spranghers,
le 1er mai 2005 |