Les chroniques | 04|02|2003 |
Au jour du malheur, réfléchis ! (Qohélèt, 7;14) | Imprimer |
Les événements du 11 septembre, tragiquement
imprimés dans nos mémoires, peuvent être l'occasion
de nous extraire de notre torpeur confortable et égoïste.
Qu'on se le dise : la violence politique, économique et sociale
entraîne forcément une violence revancharde. On ne méprise
pas impunément, longtemps, le droit des peuples ; Le terrorisme,
communément compris comme la vengeance du faible, c'est avant tout
la violence exercée par le fort contre le faible. "Dites la vérité,
Monsieur le Président, au sujet du terrorisme !" Ainsi s'indignait
Robert Bowman un évêque catholique américain, et ce
en 1998, bien avant les attentats du 11 septembre 2001. "Nous
sommes la cible des terroristes, parce que, dans la plus grande partie
du monde, notre gouvernement a défendu la dictature, l'esclavage
et l'exploitation humaine. De pays en pays, notre gouvernement a obstrué
la démocratie, étouffé la liberté, piétiné
les droits humains. Nous sommes la cible des terroristes, parce que nous
sommes haïs, et nous sommes haïs, parce que nous avons fait
des choses odieuses." Le 11 septembre, c'est quoi ? diront nos jeunes bientôt,
du style "Hitler, connais pas". L'amnésie récurrente
de nos sociétés nanties à l'égard des plus
intolérables injustices nous expose à un retour de manivelle
de la part des populations opprimées. Nous devons changer,
c'est notre intérêt. Une survie pacifique de la planète
ne peut être envisagée que dans le cadre d'un partage équitable des ressources,
un respect réel et réciproque des nations, une authentique
reconnaissance de l'altérité des peuples. La flambée généralisée du sentiment
d'insécurité provoque une méfiance croissante envers
ce qui est étrange ou étranger, aussitôt perçu
comme une menace, et d'aucuns réclament à grands frais un
état policier. Or les 273 milliards de dollars que les Etats-Unis
dépensent annuellement pour leur sécurité n'ont pas
empêché les deux tours de tomber. Robert Bowman, toujours en 1998, écrivait : "au
lieu d'envoyer nos fils et nos filles de par le monde pour tuer des arabes,
en vue de prendre possession du pétrole qui gît sous leur
sable, nous devrions les envoyer reconstruire les infrastructures, fournir
de l'eau potable et nourrir les enfants affamés par nos sanctions
économiques". "Changez tout" dit une chanson de Michel Jonasz. Si au lieu de nous crisper sur la défensive –et
l'offensive!- nous ouvrions nos mentalités, nos cœurs, nos
mains à la rencontre de l'Autre, peut-être pourrions-nous
moissonner la paix. "On n'a pas encore essayé le Sermon sur la montagne",
disait ingénument Théodore Monod. Albert Jacquard dans son
tout récent livre Dieu ?,
fait largement écho à cette idée. « Au jour du bonheur, sois
heureux; au jour du malheur, réfléchis !» Evodie Beuzart, 4 février 2003 |