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 Bible et libertés


  Jacques Chopineau

 

Le nombre 6 "racine symbolique"
36, un carré qui est aussi triangulaire
666, les crises de la fin

 

   


Un survol des nombres 6, 8, 36, 666

 

 

Dans le symbolisme numérique qui est mis en œuvre dans la Bible, ces nombres 6, 8, 36, 666 sont liés entre eux. Certes, il s’agit d’un lien symbolique, et non toujours d’un lien arithmétique.

• Prenons d’abord le cas du nombre 6  « racine symbolique ».

Le nombre 6 (et ses dérivés) réfère aux 6 jours de la création et à « tout ce qu’elle contient ». C’est à cela que font allusion les proportions bibliques du Temple de Salomon. Tous les temples édifiés par la suite seront toujours, symboliquement, des résumés de la création.

Notons que la maison de Salomon (cf. I Rois 6,2) ou l’arche de Noé (cf. Genèse 6) ne sont pas des temples. Les proportions indiquées dans ces deux cas sont celles de la « proportion dorée » (voir les pages consacrées à ce sujet : Le nombre d'or et Les nombres dans la Bible), mais ne font pas référence aux 6 jours de la création.

Mais le nombre 6 n’est pas toujours considéré en lui-même. Lorsque les apocalyticiens méditeront sur le monde et sur sa fin, ils réfléchirons sur 6 et 7. C’est que 6 réfère à la totalité du monde créé ; tandis que 7 est celui du dernier jour de la grande « semaine » de l’histoire du monde.

A première vue, les dérivés sont le triangulaire (21), le rectangulaire (42) et le carré (36). Mais le triangulaire de 6 est également le gnomon  de la série des nombres figurés dont la racine symbolique est 7.

Il faut ici renvoyer à l’introduction aux nombres dans la Bible. Rappelons que ce gnomon est toujours égal au triangulaire du nombre (entier !) précédent (= Tn-1). En sorte que -dans la série des nombres dont la racine symbolique est 7- le triangulaire de 6 sera le nombre-clé :

7   +   21   =   28 (triangulaire de 7)
28  +  21   =   49 (carré de 7)
49  +  21   =   70 (pentagonal de 7)

Chacun de ces nombres connaît -dans la Bible- des utilisations diverses. 28 en particulier : nombre « parfait » égal à la somme de ses diviseurs (1 + 2 + 4 + 7 + 14 = 28). Mais les nombres figurés suivants (49 et 70) sont également bien connus… .

• 36 : Un carré qui est aussi un triangulaire…  

Rares sont les nombres qui -représentés par des cailloux- forment deux figures : un triangle et un carré. C’est le cas de 36  (le nombre suivant dans ce cas est 1225 !).

De ce point de vue, 36 est un nombre curieux. A la fois carré (de 6) et triangulaire (de 8). Il réfère symboliquement aux 6 jours de la création (et, donc, à la totalité de ce qui existe sur la terre).

8 cependant, réfère au « huitième jour » qui le premier jour de la nouvelle « semaine » de l’histoire du monde. Cette symbolique ancienne est, dans le Nouveau Testament, surtout propre aux écrits johanniques et pétriniens.

Le nombre 8 est ainsi le symbole du monde nouveau, annoncé par le déluge qui est la fin du monde ancien, ainsi que le rappelle l’épître de Pierre :
« Eux, ayant refusé de croire, jadis, lorsque temporisait la patience de Dieu, aux jours de Noé, lequel construisait l’arche dans laquelle peu - c’est à dire 8 personnes - furent sauvés à travers l’eau.»
I Pierre 3,20
« Il n’a pas épargné l’ancien monde, mais il a protégé le huitième (homme), Noé, hérault de justice, …»
II Pierre 2,5

On peut comprendre (ce qu’on fait souvent) : « huit personnes dont Noé ». Mais le « huitième jour » qui vient après une totalité temporelle de 7 est une symbolique courante, héritée d’anciennes pratiques Le « huitième » est la marque du monde nouveau.

« Le huitième jour, l’enfant sera circoncis »
Lévitique 12,3

« Le huitième jour, ils eurent une assemblée solennelle »
II Chroniques 7,9

«… le huitième jour du mois, ils entrèrent dans le vestibule de l’Eternel et mirent huit jours à consacrer la maison de l’Eternel »
II Chroniques 29,17 

L’apparition du ressuscité à l’apôtre Thomas aura lieu, de même, un huitième jour : « Huit jours après, ses disciples étaient de nouveau dans la maison… » Evangile de Jean 2O,26

C’est là une utilisation qui peut être dite réthorico-symbolique. Elle suppose, en tous cas, une sensibilité à la valeur qualitative du nombre.

• 666 : les crises de la fin  

Dans le langage de l’Apocalypse, les crises de la fin vont être symbolisées par un nombre qui a suscité les explications les plus étonnantes, voire les plus délirantes : 666. C’est un nombre triangulaire (T36 = 666).

Le nombre 36 (= C6 = T8) a une double signification. En tant que carré de 6, il réfère à la totalité de la création qui s’achève. En tant que triangulaire de 8, il réfère au « huitième jour » qui est le premier de la nouvelle semaine. 666 -triangulaire de 36- est ainsi le nombre qui symbolise à la fois le temps des crises de la fin et le commencement difficile d’un monde nouveau :
« C’est ici qu’intervient la sagesse. Que celui qui a de l’intelligence calcule le chiffre de la bête. Car c’est un nombre d’humain : son nombre est 666.» Apocalypse 13,18.

C’est, certes, un nombre d’humain puisque ce n’est pas un nombre de Dieu. De là, de savants efforts pour trouver de quel « homme » il pouvait s’agir. Les solutions proposées ont été nombreuses. Même s’il a fallu pour cela changer 666 en 616 (variante de quelques manuscrits). Au cours de l’histoire, on a y vu Luther  et même Hitler ! Les valeurs numériques des lettres ont permis de faire des calculs jugés, en leur temps, édifiants.

En général, on s’arrête aujourd’hui à l’empereur Néron. Evidemment, cela suppose une seule orthographe  hébraïque  (NRWN QSR : Néron César). Toute autre transcription serait fausse. Mais naturellement, le nom d’un personnage historique peut avoir été visé par l’auteur du texte.

En fait, peu importe le nom de la « bête » qui persécute les justes : chaque époque a le sien. Ce qui est permanent est un nombre jugé significatif - et de racine symbolique 6 et 8, par le biais du nombre 36.

Ces équivalences sont cependant loin d’être claires pour les modernes. La valeur qualitative des nombres et leur utilisation symbolique est souvent devenue étrangère à nos modes de pensée.

Jacques Chopineau, Genappe, 30 juillet 2003