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Un « nombre » fort ancien
Les expressions « nombre d’or »
ou « proportion dorée », ou encore
« divine proportion » sont des désignations
relativement récentes. La réalité cependant
a probablement été connue dès la haute
antiquité. La proportion ainsi désignée
a été sentie comme harmonieuse.
Son expression mathématique *
(familière aujourd’hui) est
F
= 1 ± √5
2
Mais la résolution
de l’équation du second degré n’est
connue, en Occident, qu’à la fin du 15ème
siècle. Il serait donc anachronique d’attribuer
aux anciens de telles connaissances. Pourtant la proportion
est anciennement connue et calculée. Elle règne,
certes, dans les constructions des églises médiévales,
mais elle est déjà connue dans la Bible.
Il faut se souvenir que les nombres dits irrationnels
(qui ont posé bien des problèmes philosophiques
et métaphysique aux pythagoriciens, mais ce n’est
pas le lieu ici de reprendre ce vieux débat) ont été
jadis, dans la pratique, ramenés à des
approximations fractionnaires. Les anciens procédaient
de cette manière. Ainsi, le nombre que nous nommons
π équivalait à la fraction 22/7 ou le nombre
√2 devenait la fraction 17/12. L’approximation
était d’ailleurs généralement suffisante.
Il en va de même pour la « proportion
dorée » qui est exprimée par l’irrationnel 1,6180339… (la quatrième
décimale étant un zéro, on dira couramment
1,618 ou son inverse 0,618). L’approximation fractionnaire
est -dans la Bible- 3/5.
Un moderne dirait plutôt 8/5 , mais on
pourrait aussi écrire 13/8 , 21/13 etc… On pourrait
ainsi ajouter (inutilement !) des décimales au
nombre irrationnel. Mieux vaut nous en tenir aux chiffres
anciennement attestés dans la Bible. L’important
est ici d’ordre symbolique.
Par parenthèse,
la relation avec la série des nombres de Fibonacci
est évidente, mais elle ne nous intéresse pas
directement ici. En effet, Fibonacci (1175-1240 ?) est
un mathématicien très éloigné,
dans le temps, des rédacteurs des textes bibliques.
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Dans la Bible …
La « proportion dorée »
est bien connue, dans la Bible, en tant que rapport 3/5 (ou
30/50 ou 1,5 / 2,5). Qu’on en juge :
• L’Arche
de Noé
Cette arche, tu la feras longue de 300 coudées,
large de 50 et haute de 30
Genèse 6,15
Nous voyons ici, entre la largeur (50) et la hauteur
(30), la proportion 30/50, c’est à dire 0,6.
Quant à la longueur (300), elle est triple de la construction
suivante :
• La maison
de Salomon
La maison que le roi Salomon se fait bâtir (la maison
des cèdres) est exactement le tiers de l’Arche
de Noé :
Elle avait 100 coudées de longueur, 50 coudées
de largeur et 30 coudées de hauteur
I Rois 7,2
Dans les deux cas, largeur et hauteur sont dans
la même « proportion dorée ».
C’est encore le cas dans les exemples suivants :
• L’autel
des sacrifices
Tu feras l’autel en bois d’acacia : 5
coudées de long, 5 coudées de large -l’autel
sera carré- et 3 coudées de haut
Exode 27,1
Le côté du carré est en
proportion dorée de la hauteur de l’autel.
• Le coffre
du témoignage
Ils feront un coffre en bois d’acacia ; sa
longueur sera de deux coudées et demie, sa largeur
d’une coudée et demie et sa hauteur d’une
coudée et demie. Tu le couvrira d’or pur à
l’intérieur et à l’extérieur…
Exode 25,10
> Ce qui sera la réalisation d’un
expert (Betsaléel, cf Exode 37,1). Evidemment, il importe
peu que la coudée ait telle ou telle dimension :
la proportion seule importe. 1,5 et 2,5 sont dans un rapport
3/5.
• Il en va
de même pour le propitiatoire
en or (Exode 37,6) et la
table en bois (Exode 37,10). Il est encore d’autres exemples, mais ce qui précède
est sans doute suffisant. Les constructions répondent
à une intention symbolique précise -tout comme
les constructeurs des églises médiévales
obéissent à des normes jugées significatives.
De ce point de vue, l’Écriture (spécialement
le Pentateuque) est un grand temple où les formes sont
porteuses de signification.
>
Ce n’est pas le nombre isolé qui est ici porteur
de signifiance, mais la proportion indiquée. Il serait
naïf de penser que ces proportions ont été
indiquées au hasard par des scribes ignorants. Et les
études qui ne tiennent pas compte de ce symbolisme
sont superficielles -éventuellement savantes, mais
superficielles.
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En guise de conclusion
L’utilisation symbolique des nombres a
été très développée dans
les textes bibliques. Deux raisons à cela : d’une
part, tout ce qui existe, dans le ciel et sur la terre, lois
physiques ou lois religieuses, nombres ou figures….
proviennent d’un unique créateur. Les nombres
sont le miroir de cette origine. D’autre part, les nombres
sont abstraits et leur utilisation ne viole en rien l’interdiction
de se faire des représentations de ce qui est là-haut
dans le ciel ou ici-bas sur la terre. Ce sont des symboles,
non des images. Des supports de compréhension, non
des représentations à adorer.
De là, l’utilisation d’un
symbolisme numérique dans la mise en forme de nombreux
textes bibliques. De sorte que beaucoup de textes peuvent
être lus « simplement », selon
une construction narrative, législative ou poétique
« ordinaires ». Mais une autre lecture,
symbolique, est possible -ce qui demande une longue initiation…
Nous nous sommes borné ici à l’usage
de la seule « proportion dorée »,
mais il est bien d’autres particularités. Nombres,
proportions, jeux d’écriture, cryptographies…
abondent et il n’est pas toujours simple, pour un moderne,
de pénétrer dans ce monde de la symbolique.
Les études modernes
ont négligé cette étude, pour différentes
raisons, lesquelles ne sont pas toutes mauvaises -vu l’abondance
des spéculations aventureuses. Pour autant, un mauvais
usage possible ne disqualifie pas une observation juste.
Est « scientifique » cela seulement
qui est conforme à l’observation de la réalité.
Encore faut-il que l’acuité du regard soit exercée…
Jacques Chopineau,
Genappe, le 12 juillet 2003
Remarque uniquement pour les
utilisateurs de Netscape, le F de la formule
doit se lire comme un "phi"
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