Humour . . . ironie
La
Bible n’a évidemment
pas pour fonction de divertir. L’humour comme tel n’a
donc pas de fonction ici. Pour autant, l’ironie est
une fonction de la pensée humaine. Plusieurs textes
bibliques –dans
la mesure même où ils s’adressent à tous
les humains- font usage de cette ironie.
En particulier dans
cette littérature sapientielle
qui exprime une sagesse pratique : non pas « que dire
?» ou « comment penser ?» mais : « comment
faire ?». Nombreux sont les textes bibliques qui illustrent
cette ironie. On s’en tient ici au seul livre des Proverbes.
La question porte toujours sur le faire juste
et sur la dénonciation
ironique de la contradictoire. La sagesse est de l’ordre
du « conseil ». Comment faire pour se comporter
justement, c’est à dire en accord avec la réalité.
Un comportement est décrié dans la mesure où il
conduit à une absurdité.
Cela nous vaut des
descriptions étonnantes :
« Le paresseux
plonge sa main dans le plat
et ne la ramène pas à sa bouche »
Proverbes. 19,24
« Le paresseux
dit : il y a un lion dans la rue
si je sors, je serai tué »
Proverbes. 23,12 (cp 26,15)
En fait, il n’y a pas de lion,
mais le prétexte est bon pour ne
pas sortir –voire rester couché :
« La porte
tourne sur ses gongs
et le paresseux : sur son lit »
Proverbes. 26,14
Et pour ceux qui sortent et traitent des affaires,
il faut apprendre à se
défier des belles promesses qui ne sont pas suivies d’effet
:
«
Des éclairs, du vent : mais pas de pluie
tel est l’homme qui se vante d’un présent trompeur »
Proverbes.25,14
Citons encore cette saisie ironique du manège de l’acheteur
:
«
Mauvais, mauvais, dit l’acheteur
mais en partant : il se félicite »
Proverbes. 20,14
Nombreux sont les dits de cette sagesse pratique
(non une sagesse spéculative)
qui procède de la simple observation attentive. Faire rire peut être
une forme d’enseignement. Le silence également.
«
Même le sot qui se tait est compté parmi les sages
qui clôt ses lèvres est intelligent »
Proverbes.17,28
Et malheur à celui qui utilise à contre-temps
un dit de sagesse :
«
Ronce poussée à la main de l’ivrogne
tel est le proverbe dans la bouche des sots »
Proverbes. 26,9
Sagesse
Les « conseils » (proverbes,
dits de sagesse, comparaisons) affluent. Ces « conseils » sont
ce que produit le sage. Comme la vision est le propre du
prophète ou la loi religieuse est le propre du prêtre
(cf Jérémie 18,18). Dans les écrits de sagesse,
la situation habituelle est celle du vieux sage qui s’adresse à une
jeunesse inexpérimentée.
Ainsi ce développement
contre l’amour de la « femme étrangère » (Proverbes.
7,6-23) ou encore contre l’ivrognerie (Proverbes. 23). Et
toujours une vision réaliste des pratiques humaines sous
le regard de Dieu :
« Riche et
pauvre se rencontrent :
Dieu les a fait tous les deux »
Proverbes. 22,2
Pratiquement, le sage est appelé à se
maîtriser :
«
Ville percée, sans murailles
tel est l’homme qui ne maîtrise pas son souffle »
Proverbes. 25,28
Comme il est appelé à connaître
son semblable :
« Le fer aiguise
le fer
et l’homme aiguise la face de son prochain »
Proverbes. 27,17
Encore faut-il discerner entre les moments
et les personnes. En témoignent
ces proverbes dits « contradictoires », qui semblent énoncer
des vérités opposées (cp Proverbes. 26,4
et 5 !). Au sage de savoir quand, comment, à qui, dire
l’une
ou l’autre
de ces sentences.
Et finalement le sage est appelé à se
connaître lui-même
:
«
C’est une lampe divine que l’âme de l’homme
sondant tous les replis des entrailles »
Proverbes. 20,27
Mais dans tous les cas, dit le sage, nos volontés
sont bornées
:
«
De l’homme sont les projets du cœur
mais de l’Eternel la réponse de la langue »
Proverbes. 16,1
Ces « proverbes » sont –dans
la Bible- placés sous l’autorité de
Salomon, le sage par excellence. Comme les Psaumes sont placés
sous le nom de David ou les lois sous le nom de Moïse.
Ces attributions traditionnelles ne sont évidemment
pas à prendre littéralement. Il reste
que toute relecture place le lecteur actuel dans une longue
lignée
porteuse de sens.
Jacques Chopineau. Genappe le 28 avril 2007
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