L’Afrique va-t-elle évangéliser l’Europe
?
Quelle ambiance, Seigneur, quelle ambiance
! Les chants vous prennent aux tripes. Des bras se lèvent vers le ciel.
Des fidèles tombent « dans le sommeil de l’Esprit ».
Le pasteur hurle sa prédication, manifestement non préparée,
prédication interrompue par des applaudissements et
des Aleluya.. Quelle ambiance, ça oui ! Les communautés
ethniques, surtout africaines, se développent à la
vitesse « grand V ». Dans des salles souvent
minables, d’anciens garages, des usines désaffectées,
se réunissent des groupes de 50 à 300 personnes,
quasiment toute africaines, et le plus souvent pentecôtistes,
sous la houlette d’un ou de plusieurs pasteurs, souvent
autoproclamés. Ceux-ci chassent les démons,
guérissent
( ?), maudissent les marabouts, les rosicruciens, les occultistes,
les francs-maçons qui, affirment-ils, se réunissent
la nuit pour des « sabbats » anti-chrétiens
!
Dans le même quartier, quatre ou cinq
communautés
voient affluer les fidèles. Beaucoup de jeunes. Le
pasteur est parfois quasiment déifié. Il prétend
pouvoir détourner les balles destinées à l’abattre
! (affirmation entendue dans une communauté de ma
région),
mais également que, par la prière fervente,
et surtout les dons en argent déposés dans
une corbeille, les pauvres hères, parfois en séjour
illégal,
chômeurs, ou sans logis, vont devenir riches ; Dieu
donne largement à ceux qui donnent largement. Le procédé est
simple : tu mets 20€ dans la panier, Dieu t’en
enverra 1.000.000! Il faut le croire. Croire, croire,
croire ! Dieu
est le Tout-Puissant qui enrichit ses enfants parce qu’il
les aime. Un bon chrétien devient forcément
riche. (Merci Calvin qui affirma cette bourde).
Dieu merci,
existent d’autres communautés plus
sérieuses, avec des pasteurs formés dans des
instituts bibliques, évangéliques bien entendu,
mais formés. Et ceux-ci n’exigent pas que les
démunis donnent ce qui leur est bien nécessaire
pour manger un peu ou se (mal) loger.
Reste que ces communautés,
aussi sérieuses soient-elles,
ne s’ouvrent guère aux européens. Bien
au contraire, j’ai pu le constater, elles recrutent
essentiellement parmi les immigrés. Elles vivent repliées
sur elles-mêmes. Les portes sont certes ouvertes aux
autochtones, mais aucun effort n’est fait pour s’adapter
quelque peu (QUELQUE PEU) à la mentalité européenne,
tout en conservant l’enthousiasme africain. Les chants
entraînants, sont hélas rarement traduits dans
la langue du pays. L’orchestre est sympathique mais
les décibels feraient frémir Johny lui-même
! Bravo ! Mais il faut que l’européen se sente à l’aise
lui aussi. Parfois l’un ou l’autre blanc entre,
par curiosité certainement, mais s’en va après
quelques minutes.
L’Europe va-t-elle découvrir
le Dieu d’Amour,
l’Unique, dans de telles communautés exaltées
jusqu’à la transe ? Au sein desquelles une superstition
a remplacé une autre ? Où règne la peur
de la sorcellerie ?
Quant à nous, que faisons-nous
pour aller vers ces gens au si beau sourire et à la
foi profonde, mais tellement naïve ? Le christianisme
raisonnable, raisonné,
ouvert sur le monde, est-il réservé à quelques
intellectuels blancs ? Il ne s’agit pas de vouloir
convertir, mais de converser ! De montrer l’apport
de nos théologiens
libéraux. De dire notre conception de Dieu et notre
souci de l’Homme à ces frères et sœurs étrangers
(qualificatif devenu, hélas, péjoratif).
Non,
l’Afrique ne va pas évangéliser l’Europe
grâce à des pasteurs qui trépignent,
sautent, crient, menacent les démons. Si l’Europe à un
grand travail à faire pour accueillir ces chrétiens
qui ont le droit de vivre leur foi comme ils l’entendent,
elle se doit aussi de tenter de prouver que le message de
Jésus,
dégagé de toutes les légendes et les
contradictions qui figurent dans le Nouveau testament, est
libérateur.
À nous, donc, d’aller vers nos
frères
africains, ou autres, pour leur présenter notre foi.
À eux de l’accepter
ou de la rejeter. Les chemins qui mènent à Dieu
sont divers.
Jacques Cécius, Spa le 24 juin 2007 |
|