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 Les chroniques



    Jacques Cécius

 

 

 

   

 


L’Afrique à l'assaut de l’Europe

 

 


L’Afrique va-t-elle évangéliser l’Europe ?

Quelle ambiance, Seigneur, quelle ambiance ! Les chants vous prennent aux tripes. Des bras se lèvent vers le ciel. Des fidèles tombent « dans le sommeil de l’Esprit ». Le pasteur hurle sa prédication, manifestement non préparée, prédication interrompue par des applaudissements et des Aleluya.. Quelle ambiance, ça oui !

Les communautés ethniques, surtout africaines, se développent à la vitesse
« grand V ». Dans des salles souvent minables, d’anciens garages, des usines désaffectées, se réunissent des groupes de 50 à 300 personnes, quasiment toute africaines, et le plus souvent pentecôtistes, sous la houlette d’un ou de plusieurs pasteurs, souvent autoproclamés. Ceux-ci chassent les démons, guérissent ( ?), maudissent les marabouts, les rosicruciens, les occultistes, les francs-maçons qui, affirment-ils, se réunissent la nuit pour des « sabbats » anti-chrétiens !

Dans le même quartier, quatre ou cinq communautés voient affluer les fidèles. Beaucoup de jeunes. Le pasteur est parfois quasiment déifié. Il prétend pouvoir détourner les balles destinées à l’abattre ! (affirmation entendue dans une communauté de ma région), mais également que, par la prière fervente, et surtout les dons en argent déposés dans une corbeille, les pauvres hères, parfois en séjour illégal, chômeurs, ou sans logis, vont devenir riches ; Dieu donne largement à ceux qui donnent largement. Le procédé est simple : tu mets 20€ dans la panier, Dieu t’en enverra 1.000.000! Il faut le croire. Croire, croire, croire ! Dieu est le Tout-Puissant qui enrichit ses enfants parce qu’il les aime. Un bon chrétien devient forcément riche. (Merci Calvin qui affirma cette bourde).

Dieu merci, existent d’autres communautés plus sérieuses, avec des pasteurs formés dans des instituts bibliques, évangéliques bien entendu, mais formés. Et ceux-ci n’exigent pas que les démunis donnent ce qui leur est bien nécessaire pour manger un peu ou se (mal) loger.

Reste que ces communautés, aussi sérieuses soient-elles, ne s’ouvrent guère aux européens. Bien au contraire, j’ai pu le constater, elles recrutent essentiellement parmi les immigrés. Elles vivent repliées sur elles-mêmes. Les portes sont certes ouvertes aux autochtones, mais aucun effort n’est fait pour s’adapter quelque peu (QUELQUE PEU) à la mentalité européenne, tout en conservant l’enthousiasme africain. Les chants entraînants, sont hélas rarement traduits dans la langue du pays. L’orchestre est sympathique mais les décibels feraient frémir Johny lui-même ! Bravo ! Mais il faut que l’européen se sente à l’aise lui aussi. Parfois l’un ou l’autre blanc entre, par curiosité certainement, mais s’en va après quelques minutes.

L’Europe va-t-elle découvrir le Dieu d’Amour, l’Unique, dans de telles communautés exaltées jusqu’à la transe ? Au sein desquelles une superstition a remplacé une autre ? Où règne la peur de la sorcellerie ?

Quant à nous, que faisons-nous pour aller vers ces gens au si beau sourire et à la foi profonde, mais tellement naïve ? Le christianisme raisonnable, raisonné, ouvert sur le monde, est-il réservé à quelques intellectuels blancs ? Il ne s’agit pas de vouloir convertir, mais de converser ! De montrer l’apport de nos théologiens libéraux. De dire notre conception de Dieu et notre souci de l’Homme à ces frères et sœurs étrangers (qualificatif devenu, hélas, péjoratif).

Non, l’Afrique ne va pas évangéliser l’Europe grâce à des pasteurs qui trépignent, sautent, crient, menacent les démons. Si l’Europe à un grand travail à faire pour accueillir ces chrétiens qui ont le droit de vivre leur foi comme ils l’entendent, elle se doit aussi de tenter de prouver que le message de Jésus, dégagé de toutes les légendes et les contradictions qui figurent dans le Nouveau testament, est libérateur.

À nous, donc, d’aller vers nos frères africains, ou autres, pour leur présenter notre foi. À eux de l’accepter ou de la rejeter. Les chemins qui mènent à Dieu sont divers.

Jacques Cécius, Spa le 24 juin 2007