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 Les chroniques



    Jacques Chopineau

 

- Résistance et/ou terrorisme

- La violence est fille de la violence

- Le monde complice

 

   

 


Désespoir et violence

 

 

Résistance et / ou terrorisme

Depuis le commencement du monde, lorsqu’il y a une occupation, naît aussi une résistance à cette occupation. Il y a aussi, parfois, des collaborateurs de toutes sortes, actifs ou passifs, convaincus ou résignés. Dans ce cas, l’attentisme « réaliste » des uns s’oppose à l’ « irréalisme » activiste des autres. Le réalisme des uns n’est pas celui des autres.

Le vainqueur a finalement raison –au terme d’une lutte acharnée et, parfois longue. Mais aussi longtemps que dure la guerre : actions d’éclat et abominations sont le lot du quotidien. Voilà qui n’est pas nouveau.

Ce qui est clair, c’est que les résistants peuvent être appelés « terroristes » par l’occupant maître du terrain. Violences et contre-violences s’additionnent –lors même qu’elles changent de nom. Pour autant, on ne peut renvoyer dos à dos, l’occupant et l’occupé, l’agresseur et l’agressé.

C’est pourtant ce que fait l’occident, avec l’hypocrite bonne conscience que donnent les belles paroles, les nobles assurances, les grandes pétitions de principe. Certes, nous sommes pour la paix et contre la violence. Mais là où la violence règne, les prises de position purement verbales n’y changeront rien.

Des populations privées de tout (et même d’eau et d’électrité -comme à Gaza) ne sont certainement pas portées à admirer les grands états « démocratiques » et indifférents. Il ne manque pas de milieux, dans le monde arabe, où l’expression « démocratie occidentale » est péjorative.

Comment en est-on arrivé là ?

La violence est fille de la violence   

La violence, toujours, engendre la violence. On ne peut, évidemment, approuver la violence, d’où qu’elle vienne. Mais il faut connaître les causes véritables de cette violence.

D’ailleurs, la violence des forts ne porte pas le nom de violence. Dans la terminologie des puissants, il s’agit plutôt de « juste cause » ou de « nécessaire défense ».

Il en va de même pour la sainte lutte contre un démon nommé « terrorisme ». L’ennemi malin semble avoir pris la place de l’ancien Diable rouge –du temps de la subversion communiste.

Ce qui est évident, c’est que l’on a jamais, nulle part, pu fonder une paix durable sur l’occupation et la domination. L’humiliation engendre toujours le désir de faire cesser cette humiliation. Et le désespoir ne mène pas toujours à la résignation, même si le rapport de forces est aujourd’hui favorable à l’occupant. Mais il faut aller plus loin que cette évidence.

Il est clair que les parents et amis d’un tué –et même d’un emprisonné à vie- ne se résigneront jamais à cette absence. Et si la Loi est celle du plus fort, on peut rêver qu’elle soit, un jour, changée. Elle le sera, d’ailleurs, mais au prix de combien de souffrances ?

En attendant, aux représailles répondent les contre-représailles Et les attentats (arme des faibles) répondent aux glorieuses ( ?) actions militaires (arme des forts). Mais, dans tous les cas, il importe de comprendre que gagner la guerre ne signifie pas gagner la paix. Voilà ce que les vainqueurs oublient toujours.

Le monde complice   

Voir quelqu’un être agressé et ne pas lui porter secours : cela porte le nom de non-assistance. Et si le spectateur n’est pas en état d’intervenir : il peut
du moins appeler « au secours ». Mais s’il ne dit rien : il porte une part de responsabilité dans l’agression.

C’est dans ce cas que –depuis des années- notre bel Occident est témoin de l’occupation et des spolations de toutes sortes subies par le peuple palestinien. Il entre, sans doute, dans ce silence, la honte de l’épouvantable holocauste qui a jadis frappé les européens juifs. Les nazis ont d’ailleurs trouvé beaucoup de complices dans les pays d’Europe occupée. Et plus encore, de silence complice…

En ce temps-là furent écrites des pages noires de l’histoire européenne.
Et l’on peut comprendre que la naissance du petit état juif ait été perçue comme une belle renaissance d’une ancienne espérance.

Mais il faut rappeler que les palestiniens ne furent pas les coupables de cette ignominie. Pourtant, tout se passe comme s’ils devaient payer pour des fautes européennes.

En sorte que le peuple martyr, aujourd’hui, est concrètement le peuple palestinien. Peuple occupé, spolié, humilié et –s’il tente de se défendre- qualifié de terroriste.

Dans cette situation, il faut dénoncer le conformisme d’une grande partie de la presse européenne. Pour ne rien dire du suivisme ou de l’ignorance d’une télévision qui conforte les préjugés régnants. Médiocrité aussi de beaucoup
de discours politiques. Pire encore : beaucoup de responsables politiques semblent ignorer l’urgence du problème.

Dénonçons les propos « cache-misère », tant de fois entendus. Il ne sert à rien de proclamer qu’on est « pour la paix » et « contre le terrorisme ». Le désespoir crée du terrorisme. Nos anciens disaient : « on ne peut pas mâcher amer et cracher doux ».

De même, entend-on, il faut négocier. Mais a-t-on jamais vu une négociation entre le gibier et son prédateur ?

Les conditions d’une paix durable ne sont pas réunies. Malgré les discours qui mettent en avant une illusoire « feuille de route » et des accords, signés mais non respectés. Il n’y a jamais eu de « processus de paix », sauf si l’on entend par là une soumission à la loi du plus fort. Rappelons que les accords d’Oslo n’ont jamais interdit à de nouvelles colonies de voir le jour.

De qui se moque-t-on ?

Certes, Israël a le droit de vivre. Mais les palestiniens aussi ont le droit de vivre. La question est : où ? En quel lieu ? Car tous les humains, de chair et de sang, ont besoin d’un lieu. où vivre. Et ce lieu palestinien est aujourd’hui de plus en plus réduit et morcelé. A-t-on jamais imaginé un état sans souveraineté réelle, sans frontières respectées, et –bien entendu- sans armée. Un état ? Oui, peut-être, mais impuissant, dépendant, soumis, sous contrôle…

Je ne doute pas qu’il existe des israéliens conscients de cette injustice fondamentale. Et naturellement, de nombreux juifs de par le monde.
Mais, au point où nous en sommes, il faut qu’ils se fassent entendre.
Pour que s’établisse cette justice qui est le seul terrain sur lequel la paix peut se fonder.

Jacques Chopineau, Genappe, le 7 juillet 2006