Sous le titre « Allegro
ma non troppo », l’historien italien Carlo M.
CIPOLLA a rassemblé deux textes très courts,
dont le second justifie le sous-titre : « les lois
fondamentales de la stupidité humaine ». L’ouvrage
a été traduit en 1992 et publié aux éditions
Balland à Paris. Le premier texte, à la veine
humoristique marquée, traite du rôle du poivre
dans l’histoire du moyen-âge. Nous ne rendrons
compte que du second, encore plus ironique, qui prolonge
une réflexion antérieure que nous avions engagée
sous la bannière de la connerie…
D’avance
nous nous excusons de manquer de l’esprit qui préside
de part en part à la rédaction de l’essai, que l’on
voudrait pouvoir reproduire de la première à la dernière
ligne. Nous en ferons néanmoins de larges citations.
L’auteur distingue cinq lois fondamentales qu’il exprime en peu de
mots, que nous nous efforcerons de synthétiser encore ;
- 1. « Toujours
et inévitablement, chacun d’entre nous sous-estime la quantité d’individus
stupides en circulation »
- 2. On trouve la même proportion d’individus
stupides dans tout groupe social quel qu’il soit
- 3. Cet individu
se définit par le fait « qu’il fait du tort à un
autre ou à d’autres sans en tirer aucun avantage pour (lui-même) » voire
pour en subir une perte
- 4. « Les individus qui ne sont pas stupides
sous-évaluent toujours le potentiel de nocivité des personnes
stupides » et
commettent trop souvent l’erreur majeure de traiter ou de s’associer
avec elles
-
5. « Les gens stupides sont les personnes les plus
dangereuses qui soient. La personne stupide est plus dangereuse que le
bandit »
Si
l’on excepte la Seconde Loi qui gagnerait à être démontrée,
je souscris pleinement aux autres ainsi qu’aux conséquences
qui s’y attachent. Ainsi, les gens stupides sont effectivement plus
dangereux que les gangsters car ils sont imprévisibles et ils sont
plus nuisibles car, au contraire de ces derniers qui, de quelque façon,
se bornent à redistribuer
autrement les richesses, ils appauvrissent globalement la société en
causant des pertes sans avantage pour eux-mêmes.
Abordons la question
du pouvoir. « Les classes et les castes (…)
furent les institutions qui, dans les sociétés préindustrielles,
permirent à un flux constant de gens stupides d’accéder à des
positions de pouvoir. Dans le monde industriel moderne, classe et caste perdent
de plus en plus d’influence. Mais à leur place, on trouve partis
politiques, bureaucratie et démocratie. Au sein d’un système
démocratique, les élections au suffrage universel sont un instrument
d’une grande efficacité pour assurer le maintien stable de la
fraction (de personnes stupides) parmi les puissants. Il nous faut ici rappeler
qu’en
vertu de la Deuxième Loi, une fraction (constante) de gens qui votent
est stupide et les élections offrent à celle-ci une magnifique
occasion de faire du tort à tous les autres, sans tirer de son action
le moindre bénéfice pour elle-même. En réalisant
cet objectif, cette fraction contribue à maintenir une proportion
(constante) de personnes stupides parmi celles qui sont au pouvoir. »
« Toute estimation chiffrée (du
nombre de gens stupides) se révélerait
n’être qu’une sous-estimation ». C’est
là le
corollaire de la première loi, qui doit nous inciter à la
plus grande vigilance. Une personne avertie en vaut deux ! Mais, en toute
hypothèse, « les
affaires humaines sont, de l’avis de tous, dans un état
déplorable.
Ce n’est d’ailleurs pas là une nouveauté. Aussi
loin que l’on regarde en arrière, il en a toujours été ainsi. »
Daniel Parotte, juriste, athée, Liège
le 26 janvier |
|