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 Les chroniques



    Nadine de Vos

 

 

 

   

 


Pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font: ils sont programmés !

 

 

Science et Vie n° 1055 d'août 2005 titre « Pourquoi DIEU ne disparaîtra jamais ? » et accroche avec les trois phrases suivantes : « Notre CERVEAU est programmé pour croire », « La "MOLÉCULE DE LA FOI" identifiée » et « La religion augmente L'ESPÉRANCE DE VIE » - article de Nicolas Revoy et Isabelle Bourdial.

Il aura fallu de longues années pour lire cette réaction aux articles de Newberg et Alavi (2001) ainsi qu'aux travaux de Persinger qui, depuis plus de vingt ans, se penche sur les relations entre certaines activités électriques repérées dans les lobes temporaux et les expériences mystiques.

« Notre CERVEAU est programmé pour croire »

(Ce à quoi j'aime ajouter : et pour douter)
L'explication de Dan Sperber, cité dans l'article place un sérieux bémol à cette affirmation aguichante. Il déclare :
" Les croyances religieuses mettent en scène des personnages dotés de pouvoirs surnaturels (…) Or, cela viole des notions intuitives dont nous héritons dès la naissance."

L'idée de Dieu n'est pas innée mais notre perception intuitive du réel l'est. Lorsque les croyances religieuses interviennent, cette perception est chamboulée ce qui provoque une forte réaction émotionnelle… Au bout du compte, l'émotion est plus forte, plus convaincante que la logique et la raison. À la partie cognitive, il faut ajouter la partie émotionnelle liée à la déception, à la mort, au coût non-rationnel qu'on est prêt à payer précise Scott Atran dans l'interview très intéressante qu'il accorde à S&V.

« La "MOLÉCULE DE LA FOI" identifiée »

Un chapeau de plus pour la sérotonine !
Que des neurotransmetteurs soient impliqués dans la religiosité est une thèse assez séduisante; il serait tentant de conclure que la propension à croire aurait un fondement biologique et dépendrait du système de régulation de la sérotonine. Si cette hypothèse devait se vérifier on pourrait déduire que les croyants ne sont pas responsables de leur foi, qu'ils n'auraient pas le choix de croire ou non. On pourrait se poser la question de savoir ce qu'il advient en cas de modification de la quantité de sérotonine libérée dans le cerveau… Cela pourrait expliquer – qui sait ? – certaines expériences de conversion ou d'abandon des croyances. Dans tous les cas, exit le libre arbitre.

« La religion augmente L'ESPÉRANCE DE VIE »

Croire rassure, réconforte. Les mythes calment les craintes, donnent des « explications »; l'homme en quête de stabilité se donne des certitudes et se berce d'illusions. Le croyant aurait moins de stress existentiel, moins peur de la mort. Tout ceci au conditionnel, évidemment, car tous les cas de figure sont possibles et la dimension culturelle est de poids. Les principes rétrogrades qui régissent encore les grands monothéismes et la vie de nombre de croyants, p.ex., ne constituent pas spécialement l'idéal du bon épanouissement personnel ni ne leur libèrent la pensée.

Nadine de Vos, Bruxelles, 14 août 2005

- Andrew Newberg est neurobiologiste et directeur de la clinique de médecine nucléaire de l'université de Pennsylvanie.
- Dan Sperber est directeur de recherche à l'Institut des sciences cognitives Jean-Nicod à Paris.
- Scott Atran est anthropologue cognitif et directeur de recherche à Jean-Nicod également.