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 Bible et liberté



    Jacques Chopineau

 

- Quel chemin pour l’homme ?

- Ceux du chemin

 

 

 

 

 

 

 

 

Note (*)

Ces deux citations sont tirées des Betrachtungen über Sünde, Leid, Hoffnung und den wahren Weg (l’édition utilisée ici est celle de: Suhrkamp Verlag 1964). Ces textes sont, sans doute, moins connus que les oeuvres proprement littéraires de cet auteur, merveilleux écrivain à l’humour parfois terrible, mais aussi grand visionnaire et profond penseur.

 

   

 


Un chemin d’homme

 

 

Quel chemin pour l’homme ?  

« Quel homme comprend son chemin ? » Proverbes 20,24

L’homme ne connaît pas son chemin. Pourtant, de la naissance à la mort, il n’en aura pas d’autre. Toute voie religieuse, également, connaît cette perspective. La vie est un chemin, même si le but est inconnu, ou bien parfois visible un instant, comme un éclair dans la nuit.

Il n’est pas d’image plus universelle que celle du chemin. Entre une origine et une fin… une fin qui est un but, ou bien une simple déperdition. Ainsi est tout ce qui vit. Si le grain ne meurt… Il ne porte pas de fruit. Tout ce qui naît évolue, se transforme et meurt, faisant place à d’autres naissances, d’autres évolutions, d’autres morts. Ainsi la vie continue…

L’idée même de pèlerinage se fonde sur l’existence d’un chemin (difficile) et d’un but à atteindre. Il ne s’agit donc pas d’un voyage d’agrément, ni d’une promenade touristique. Pas de but sans épreuve.

« Tu es la tâche. Non étudiant, en aucune manière » Franz Kafka (*)

Tu es toi-même la tâche à accomplir. Non un devoir extérieur, comme un devoir d’étudiant . En tout ce que tu fais, n’oublie pas que tu es toi-même l’œuvre à réaliser. C’est là ton chemin.

Le « chemin » signifie, en termes bibliques, « manière d’être »,
« comportement » :

Améliorez vos chemins et vos agissements. Jérémie 7,3.5

En sorte que nombreux sont les chemins jugés impossibles par celui que les proverbes bibliques appellent le paresseux :

« Le paresseux dit : il y a un lion dans la rue : Si je sors, je serai tué »
Proverbes 22,13 (cp 26,13)

Mieux vaut, dès lors, ne pas prendre ce risque ! Mais, sans risque : il n’y a pas de chemin.

« Le vrai chemin passe sur un fil qui n’est pas tendu dans les hauteurs, mais juste au ras du sol. Il semble destiné à faire trébucher, plutôt qu’à être parcouru » . Franz Kafka (*)

Chez ce grand écrivain, un tel réalisme trouve, sans doute, sa source lointaine dans la sagesse biblique. Le « vrai chemin » est une épreuve quotidienne, non une grande idée. De là, cette image d’un fil tendu au ras du sol et non dans les hauteurs !

Ceux du chemin   

Les premiers chrétiens sont ceux du chemin –ce « chemin » persécuté (Actes 22,4) trouve, certes, ses opposants (Actes 19,9) et occasionne des troubles (Actes 19,23). Mais il est aussi appelé « chemin de la vie » (Actes 2,28),
« chemin du salut » (Actes 16,17), « chemin de la paix » (Luc 1,79), « chemin de la justice » (II Pierre 2,21)…

Nous retrouvons la même symbolique dans la Bible hébraïque et dans la religion juive. Le thème du chemin revient souvent. Pour faire bref, rappelons quelques textes (mais il en est bien d’autres).

« Je raconte mes chemins et tu me réponds
apprends-moi tes décrets
fais-moi comprendre le chemin de tes directives
que je médite tes merveilles !
… .
Éloigne de moi le chemin du mensonge »
Psaume 119, 26.27.29.

Ce chemin doit être cherché et appris, de différentes manières selon les cas (loi religieuse, conseillers nombreux et sages…). En effet :

« Le chemin du fou est droit à ses yeux ». Proverbes 12,15

« Tous les chemins de l’homme sont purs à ses yeux ». Proverbes 16,2

« À l’homme les arrangements du cœur mais du Seigneur, les arrangements de la langue » . Proverbes 16,1

Autrement dit : A l’homme les pensées du cœur, mais la réponse (de la langue) ne lui appartient pas.

De même, dans l’Islam où cette expression coranique revient souvent : « la voie de la lumière » pour caractériser la sortie de l’obscurité ordinaire. Ce thème mériterait de longs développements. Le pèlerinage (un des piliers de l’Islam) est aussi un rappel de cette direction fondamentale.

Toutes les voies religieuses sont un chemin. Mais l’histoire des religions est pleine de doctrines, de systèmes, de dogmes… qui sont des installations durables dans des édifices provisoires. Il faut cependant se souvenir que –selon la parole d’un sage (indien)- « une route n’est pas une maison ».

Ce qui caractérise, en premier, un chemin, c’est son but. Les particularités du parcours relèvent de l’anecdote. Ainsi, les éventuelles difficultés sont des épisodes, parfois malheureux. Mais quel chemin n’a pas ses embûches ?

Jacques Chopineau. Genappe le 02 septembre 2007